MAYA. DE L'AUBE AU CRÉPUSCULE, COLLECTIONS NATIONALES DU GUATEMALA (exposition)
Il faut remonter à 1968 pour trouver la trace d'une exposition consacrée en France à l'art maya du Guatemala. L'exposition présentée du 21 juin au 2 octobre 2011 au musée du quai Branly constitue donc une véritable découverte, en dépit de sa dimension restreinte. Elle permet d'apprécier la richesse de cette civilisation, du moins pour ce qui touche à ses manifestations les plus prestigieuses, provenant en particulier des grandes cités du Petén, Mirador, Nakum ou Cancuén. De plus, depuis cinquante ans, les recherches archéologiques se sont succédé sans discontinuité. Pour le seul Petén, plus de vingt-cinq projets annuels enrichissent nos connaissances, apportent de multiples témoignages de la diversité de cette civilisation et modifient profondément notre compréhension de son évolution. L'archéologue américain Richard Hansen et le Museo Nacional de Arqueología y Etnología du Guatemala, qui sont à l'origine du projet, ont été particulièrement attentifs dans le choix des œuvres, souvent issues de fouilles récentes, comme le marqueur de Cancuén ou le panneau de La Corona, miraculeusement préservé des pillages qui avaient dévasté ce site. Rappelons ici que plus d'une trentaine de sculptures de La Corona ont circulé sur le marché de l'art depuis les années 1970 sans que l'on puisse, jusqu'à la découverte récente de ce monument, leur attribuer une provenance. Le même souci de choix d'objets récemment mis au jour vaut pour de nombreux récipients céramiques, de petits objets en jade ou des mosaïques de coquillages.
Les cent soixante-deux objets présentés, qui proviennent presque en totalité des collections du Musée national, illustrent successivement les périodes et les régions du Guatemala. On oublie trop souvent que la civilisation maya ne s'est pas développée uniquement dans la forêt tropicale du Petén, mais qu'elle couvre également les hautes terres et la côte pacifique, comme en témoignent les pièces de Takalik Abaj. Les fouilles qui se multiplient actuellement sur le versant Pacifique contribuent largement à la réinterprétation des origines de cette civilisation et à la compréhension des relations avec les civilisations voisines ou lointaines, dont Teotihuacán. Si, en revanche, les hautes terres souffrent d'un déficit relatif de recherches récentes, leur importance est soulignée dans cette manifestation par leur nombre : près de la moitié des objets proviennent de sites des hautes terres (Nebaj, Kaminaljuyú, Mixco Viejo). On doit souligner la richesse des pièces métallurgiques, ou l'originalité de l'iconographie bien différente des céramiques classiques.
De même, sur le plan chronologique, par-delà les splendides récipients polychromes de la période maya classique (250 apr. J.-C. - 1000 apr. J.-C.) assez bien connus, les pièces préclassiques (de 2000 av. J.-C. à 250 apr. J.-C.), dont un très beau vase florero stuqué, témoignent de la longue maturation maya, en particulier dans le bassin de Mirador et au cœur du Petén. Contrairement aux idées reçues, l'effondrement des grandes cités du Petén vers le ixe siècle ne marque pas la fin de la civilisation maya : les urnes, les sculptures ou les objets en métal des sites des hautes terres attestent de la perpétuation des traditions mayas au Postclassique.
Au sein de cet ensemble réduit mais très homogène, quelques pièces ressortent, bien mises en valeur par la muséographie. La stèle 7 de Piedras Negras, le panneau 19 de Dos Pilas, ou celui de La Amelia témoignent de l'art monumental et de l'importance de l'écriture, en contrepoint des arts mineurs, tout aussi sophistiqués : des bijoux en os finement travaillés, des excentriques en obsidienne (objets sculptés en roches dures qui devaient participer à la fonction rituelle des prêtres mayas lors des sacrifices humains), des ornements de jade, un fragment[...]
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Écrit par
- Éric TALADOIRE : professeur émérite des Universités
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