MAYAS
Une première apogée préclassique
Sans qu'on puisse encore mesurer l'importance relative des apports extérieurs et du dynamisme interne, il reste que leur conjonction aboutit au Préclassique récent (300 av. J.-C.-250 apr. J.-C.) à un premier apogée de la civilisation maya. Son aspect le plus frappant est l'omniprésence, sur tout le territoire, d'une céramique particulière appelée Sierra Red, qui se définit par sa couleur rouge cireuse au toucher. Du nord de la péninsule du Yucatán aux contreforts des hautes terres, on a découvert dans tous les sites explorés et fouillés des quantités variables, mais importantes, de cette poterie, ce qui confirme simultanément une forte croissance démographique et une homogénéisation culturelle. D'autres traits renforcent cette interprétation, comme la présence sur les pyramides, de part et d'autre des escaliers, de masques monumentaux en stuc, qui représentent des dirigeants ou des créatures surnaturelles associées à des principes cosmologiques. L'exemple le plus fameux est celui de la pyramide E-VII-sub de Uaxactún, mais d'autres masques proviennent de Tikal, Calakmul ou Cerros, au Belize, pour ne citer que les plus connus. Leur symbolisme est fonction de leur localisation, mais leur seule existence prouve la maîtrise des techniques de fabrication du stuc. D'autres découvertes attestent d'innovations multiples : une tombe polychrome à Tikal, pour ce qui touche à la peinture et aux pigments, des objets porteurs de glyphes, voire de dates, comme la plaque de Leyde, qui confirment la maîtrise de l'écriture et du calendrier. De façon plus surprenante, la présence à Calakmul d'une véritable voûte avec une clef est un cas unique à ce jour. La maîtrise de cette technique pose la question des choix technologiques. Si les architectes mayas connaissaient la voûte, pourquoi ont-ils privilégié la fausse voûte à encorbellement pour leurs constructions ? Une question de même nature porte sur la roue, dont le principe est connu, mais qui ne fera jamais l'objet d'une utilisation fonctionnelle.
Quant à la complexité du calendrier et du système d'écriture mayas, elle ne saurait se résumer en quelques lignes. Il est plus pertinent de souligner que à côté des centaines de monuments porteurs d'inscriptions datées, on dispose, pour les déchiffrements, d'un nombre croissant d'objets qui incluent des textes en écriture cursive, la même qui fut utilisée sur les codex (les manuscrits pictographiques) qui ont permis peu à peu de lire les glyphes. Actuellement, les épigraphistes parviennent à déchiffrer près de 80 p. 100 des glyphes connus. Et en s'appuyant sur les diverses langues existantes, chol ou yucatèque, on parvient à transcrire les noms et les toponymes. La recherche s'enrichit également de l'identification d'autres systèmes, comme les textes mixe-zoques, voire olmèques, si la découverte récente d'une inscription attribuée à cette civilisation est confirmée. Mais il ne faut pas oublier que les inscriptions mayas, malgré leur caractère historique, sont aussi des instruments de propagande politique, profondément empreints de symbolisme mythologique.
Au sein de la croissance générale de la civilisation maya, certaines régions et quelques sites connaissent un développement particulièrement spectaculaire. Parmi eux, Mirador, au nord du Petén, est le plus important : le seul complexe d'El Tigre, l'un des nombreux ensembles de cette cité, atteint le volume impressionnant de 428 680 mètres cubes. D'autres sites, Nakbé et Edzná au Campeche, Komchén au nord du Yucatán, se dotent d'ensembles monumentaux comparables. À Nakbé apparaissent les premiers groupes triadiques, trois temples associés dont la disposition obéit à des conceptions religieuses et cosmogoniques. Des chaussées pavées relient groupes et sites voisins. Des[...]
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Écrit par
- Éric TALADOIRE : professeur émérite des Universités
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