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MAYAS

Le Classique ancien : un conflit dramatique

Le Classique ancien (300-600 apr. J.-C.) est dominé par la rivalité qui oppose les deux grandes cités de Tikal et Calakmul, avec en arrière-plan l'ombre menaçante de Teotihuacán. Calakmul, comme Tikal, a entamé sa croissance dès le Préclassique récent, et les travaux mettent au jour des édifices, des frises, des sépultures prestigieuses qui témoignent de l'ancienneté de son occupation. Sans qu'on puisse déterminer le rôle de ces deux entités dans l'effondrement de Mirador et des cités du nord du Petén, Calakmul et Tikal ont bénéficié du vide créé par la disparition de concurrents potentiels. Mais leur situation diffère.

Copán, le terrain de jeu de balle - crédits : Jean-Pierre COURAU/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Copán, le terrain de jeu de balle

Tikal, dont la dynastie est déjà bien implantée, se trouve sur l'une des routes d'échanges qui traverse la forêt. Elle entretient déjà des liens avec des cités lointaines, en particulier la puissante capitale du Mexique central. Sa position stratégique comme sa prospérité sont peut-être à l'origine des convoitises de Teotihuacán. Vers la fin du ive siècle, Tikal puis les sites voisins Uaxactún et Río Azul tombent aux mains de conquérants étrangers. Loin de l'affaiblir, ils donneront à Tikal un pouvoir inégalé. Le cœur du Petén n'est pas la seule région qui passe sous le contrôle de Teotihuacán. Dans les hautes terres, Kaminaljuyú fournit de nombreux indices d'une forte présence de gens originaires de la métropole mexicaine. Édifices construits en talud-tablero, matériel céramique, sépultures et offrandes funéraires en sont autant de preuves. Il en va de même à Copán, où le dirigeant Yax K'uk Mo' serait également originaire de Teotihuacán. Toutes ces cités sont localisées sur des routes d'échanges ou à proximité de ressources stratégiques : le jade de la vallée du río Motagua, les gisements d'obsidienne d'El Chayal ou d'Ixtepeque. Mais l'influence de Teotihuacán dépasse ces implantations locales et, sur plusieurs sites, des représentations du dieu de l'orage de Teotihuacán (à Yaxhá), des céramiques tripodes (au Belize) et des figurines creuses (à Becán) évoquent la puissance de la métropole mexicaine.

Calakmul doit-elle à sa localisation dans une région écartée, plus pauvre, d'avoir échappé à ce contrôle ? Sa situation lui permet une croissance régulière et continue qui la conduit à se poser en rivale, souvent victorieuse, de Tikal. Il n'est pas utile de détailler ici l'affrontement entre les deux puissances, mais il est hors de doute qu'il a impliqué la plupart des cités mayas du Petén et leurs dynasties naissantes. Au fil des conflits, Calakmul a su tisser des liens d'alliances, peut-être même de vassalité, avec les ennemis de Tikal, Caracol, Naranjo, voire avec les transfuges de Dos Pilas. Les monuments sculptés, les stèles retracent sur ces nombreux sites l'histoire de cette coalition puissante mais fragile, qui est parvenue à étouffer Tikal, puis à l'écraser, réduisant sa dynastie au silence pendant près de cent trente ans (562-692). Mais Calakmul n'a pas réussi à unifier les cités rivales et à transformer cette coalition hétéroclite en une structure homogène, un État. D'autres cités, comme Palenque, sont demeurées fidèles à Tikal, d'autres encore, Copán ou Quiriguá, aux confins méridionaux des basses terres, sont restées à l'écart.

Les véritables bénéficiaires de ces guerres permanentes sont les dynasties locales, qui ont profité des circonstances et de l'épuisement des belligérants pour acquérir puissance et prospérité. Lorsque Tikal réussit à retourner la situation en sa faveur et écrase à son tour son ennemie, les basses terres se sont divisées en une cinquantaine d'entités politiques, qui rivalisent d'énergie et d'activité, pour donner naissance à l'époque de la splendeur.[...]

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Cylindre à trépied, art maya - crédits : F. Guénet/ AKG-images

Cylindre à trépied, art maya

Copán, le terrain de jeu de balle - crédits : Jean-Pierre COURAU/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Copán, le terrain de jeu de balle

Visage modelé, art maya - crédits : Jean-Pierre Courau/ Gamma-Rapho/ Getty Images

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