MAYAS
Une grande diversité interne
Même si les grands sites du Petén partagent les caractéristiques qui donnent à la civilisation son unité, on ne saurait minimiser la diversité des expressions régionales. La division même en entités rivales ainsi que la variété des ressources ont facilité cette recherche de spécificité. Elles l'ont parfois même rendu inévitable.
Au sein d'un art maya classique, certaines cités innovent. Copán ou Toniná préfèrent aux stèles la statuaire, la sculpture en ronde bosse. Les images de leurs dirigeants ressortent du cadre architectural, pour trôner sur des piédestaux. À Copán, de véritables mises en scène donnent aux monuments un caractère dynamique : ainsi, une statue doit être vue en perspective, afin qu'on en saisisse le sens.
À Palenque, la sculpture en pierre est délaissée au profit du stuc : bas-reliefs, moulages ou modelages décorent les façades, les linteaux, les montants de porte. Cet autre médium offre d'autres possibilités de recherche et de représentation pour les dirigeants locaux, en architecture notamment. Les temples de Palenque, tout en respectant des normes communes comme le principe des temples triadiques (les temples de la Croix, du Soleil et de la Croix-Feuillue) ou celui du temple-pyramide surmontant le tombeau de Pacal (le temple des Inscriptions), acquièrent une finesse et une élégance qui les situent à part, dans l'art maya. D'autres cités conçoivent des organisations spatiales originales, comme les complexes jumeaux de Tikal.
Ailleurs, comme dans le sud-est du Petén, c'est l'occupation même du territoire qui diffère. Peu de grandes cités dominantes, mais au contraire une abondance de petites entités voisines, qui couvrent un vaste territoire sans que l'on comprenne encore bien les modalités de leur organisation politique. Bien plus au sud, sur les contreforts des chaînes volcaniques et le piémont de la côte du Pacifique, autour de Santa Lucía Cotzumalguapa, fleurit un ensemble qui partage avec les Mayas bien des traits architecturaux, mais développe une spécificité dans sa sculpture. Les sites comportent de grandes acropoles ou plates-formes, le plus souvent de terre, aux revêtements de pierres. Et, à côté des traditionnelles stèles, les habitants innovent avec des colonnes, des statues, des sculptures à tenons ou des monuments formés de pièces emboîtées. Les représentations sont tout aussi variées (crânes, personnages en action, plantes locales) et leurs glyphes n'appartiennent pas à l'écriture maya classique.
C'est surtout au Yucatán que se mettent en place des variantes régionales qui se différencient non seulement par leur art, mais aussi par leur structure sociale et politique. Le premier de ces styles est localisé au Campeche, dans la région de Río Bec, à proximité immédiate du Petén. Les sites de Río Bec, Becán, Chicanna, Hormiguero sont dépourvus de stèles et d'inscriptions glyphiques et ne comportent pas non plus de temples-pyramides, d'acropoles ou de terrains de jeu de balle. Inversement, ils disposent d'édifices résidentiels bas surmontés de tours en trompe l'œil et aux façades décorées de masques et de motifs géométriques. Si l'on retrouve dans l'iconographie des caractères mayas, l'originalité de cet ensemble tient dans l'absence de centre monumental qu'on puisse associer à une dynastie. Les édifices sont dispersés en petits groupes de taille presque équivalente suggérant l'absence de pouvoir central, et peut-être au profit d'une organisation politique de type aristocratique, mais il est trop tôt pour l'affirmer. Plus au nord, le style Chenes est encore plus mal connu, faute de fouilles. Sa caractéristique majeure demeure la présence de petits temples dont la façade, en mosaïque de pierres, figure le monstre terrestre maya. La porte, telle une gueule grande ouverte, est surmontée de la mâchoire supérieure et du mufle, la plate-forme d'entrée[...]
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Écrit par
- Éric TALADOIRE : professeur émérite des Universités
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