KERANGAL MAYLIS DE (1967- )
Maylis de Kerangal est née le 16 juin 1967 à Toulon, dans une famille de la petite noblesse bretonne. Fille d’un pilote de navire et petite-fille d’un capitaine de la marine marchande, elle passe son enfance au Havre puis fait ses études à Rouen et à Paris : classes préparatoires littéraires, puis cursus d’histoire, philosophie et ethnologie. À partir de 1991, elle publie des guides de voyage et des ouvrages pour la jeunesse. En 1997, elle fait deux séjours dans le Colorado.
Apprendre et raconter
Ses premiers romans, Je marche sous un ciel de traîne(2000)et La Vie voyageuse(2003), sont inspirés de ses voyages. En 2004, elle crée les éditions « jeunesse » Le Baron perché et participe très largement à la revue puis aux éditions du collectif d’écrivains Inculte, avec Arno Bertina, Claro, Mathias Énard et Mathieu Larnaudie. Elle dit avoir trouvé une façon d’écrire plus personnelle avec le recueil de nouvelles Ni fleurs ni couronnes (2006) puis le roman Dans les rapides (2007) : « Après mes deux premiers romans (…) écrits avec un je narratif, quelque chose s’est déchiré et éclairci en même temps : le refus de passer par l’introspection. » (2014)
Corniche Kennedy (2008) évoque une bande d’adolescents adeptes des plongeons dangereux. Cette histoire assez sombre, entre intrigue policière et analyse sociologique, qui a Marseille pour toile de fond, figure dans la sélection de plusieurs prix littéraires. En 2010, Maylis de Kerangal reçoit le prix Médicis pour Naissance d’un pont, roman épique et choral dans lequel la construction d’un pont lui permet d’œuvrer à l’achèvement d’un roman, mais aussi d’infiltrer un univers aux antipodes du sien en s’appropriant les techniques et le vocabulaire de l’ingénierie.
Réparer les vivants (2014) touche un large public et reçoit plusieurs prix attribués par des lecteurs. Ce beau roman métaphysique, dont le titre reprend une réplique de Tchekhov – « enterrer les morts et réparer les vivants » –, est un livre de transports et de passages (de la vie à la mort, de la mort à la vie), qui dure précisément 24 heures et raconte la greffe d’un cœur. La romancière y explore le langage technique et le monde clos du milieu médical tout en restituant de manière très subtile des émotions puissantes et complexes.
Un monde à portée de main (2018) s’intéresse à la matière, aux gestes et aux mots de la peinture, à travers l’apprentissage des techniques de l’illusion puis les chantiers que mène à bien une créatrice de décors en trompe-l’œil et de copies plus que parfaites. Le roman commence à Bruxelles, passe par les studios de Cinecittà, et s’achève dans la grotte de Lascaux, où les origines de l’art sont comme à portée de main : pour bien copier, il faut comprendre et devenir, selon le concept deleuzien d’ouverture au champ des possibles – devenir préhistorique par exemple. Par la fiction, en peinture comme en littérature, on accède à une forme de vérité.
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Écrit par
- Christine GENIN : agrégée de lettres, docteure ès lettres, conservatrice à la Bibliothèque nationale de France
Classification
Média
Autres références
-
LITTÉRATURE FRANÇAISE CONTEMPORAINE
- Écrit par Dominique VIART
- 10 290 mots
- 10 médias
...avait attiré l’attention. Sensibles aussi bien à la disparition de la classe ouvrière (Aurélie Filippetti, François Bon) qu’à la mondialisation et aux nouvelles technologies (Maylis de Kerangal, Naissance d’un pont, 2010 ; Élisabeth Filhol, La Centrale, 2010), aux difficultés et prouesses du monde...