MÉDECINE Médecine prédictive
Cancer et médecine prédictive
Examinons d'abord le cas des cancers héréditaires. Ils ne représentent qu'un petit groupe de tumeurs où l'influence de caractères génétiques transmissibles est prédominante. Les recherches de la génétique des formes familiales de cancers ont commencé par les études sur le rétinoblastome, études qui ont permis de bâtir la théorie des différentes mutations successives à l'origine de la cancérisation. En 1994, un gène responsable avait été localisé pour plus d'une douzaine de cancers familiaux, et le gène a été identifié pour une dizaine d'autres cancers.
Les méthodes de diagnostic sont fondées soit sur une analyse de la coségrégation de marqueurs polymorphes dans une famille, soit sur l'analyse directe de la mutation. On se trouve ici dans le cadre des diagnostics présymptomatiques. Le risque de développer la maladie pour les sujets ayant hérité de l'anomalie génétique est en général très élevé (autour de 80 p. 100 et pouvant atteindre 100 p. 100). C'est donc un mode d'hérédité dominante à forte pénétrance. Toutefois, dans certains cas, il peut y avoir, pour la même mutation, une expression phénotypique variable, avec différentes localisations de cancers.
Ce cadre s'applique aux formes familiales des cancers les plus fréquents pour lesquelles on dispose de tests génétiques prédictifs. Il s'agit d'abord du cancer colorectal. Ce cancer, qui touche autant l'homme que la femme, est le deuxième en fréquence dans un pays comme la France, vingt-cinq mille nouveaux cas sont diagnostiqués annuellement. Une transmission héréditaire dominante concernerait de 5 à 10 p. 100 des patients, et plusieurs gènes ont, ces derniers temps, été mis en évidence. La plupart de ces gènes interviennent dans les mécanismes de réparation de l'ADN. La principale hypothèse est que le colon serait très sensible aux dysfonctionnements de cette réparation, sous l'effet conjoint du renouvellement constant des cellules de la muqueuse digestive et de la présence de substances cancérigènes provenant de l'alimentation et de la flore microbienne digestive.
Il faut ici distinguer la « polypose adénomateuse familiale » (FAP), qui représente environ 1 p. 100 des cancers colorectaux, et le « cancer colorectal héréditaire sans polypose » (HNPCC), qui représente entre 3 à 5 p. 100 des cancers colorectaux. Des données scientifiques récentes laissent en outre penser qu'un facteur héréditaire existerait dans une proportion plus importante – jusqu'à 30 p. 100 – de ces cancers digestifs. Le gène de la FAP a été identifié, et de nombreuses mutations ont été caractérisées. Quatre gènes de l'HNPCC ont été identifiés avec de nombreuses mutations selon les sujets atteints. « Lorsque la même mutation a été retrouvée chez plusieurs sujets atteints, il est possible de déceler dans une famille les sujets jeunes porteurs du gène muté », a estimé le Comité national d'éthique. « Pour eux, le risque de cancer colorectal est pratiquement de 100 p. 100 avant cinquante ans.
Les cancers du sein (vingt-cinq mille nouveaux cas par an en France) peuvent également avoir une dimension génétique et héréditaire. Au cours des dernières années, d'importants progrès ont été réalisés, permettant la localisation puis l'identification de plusieurs gènes impliqués dans le processus de cancérisation. Il y a quelques années, une société privée réussissait, en liaison avec des chercheurs américains de l'Utah travaillant sur des familles de mormons, à cloner un gène sur le bras long du chromosome 17. Baptisé BRCA1, ce gène semble directement impliqué dans près de la moitié des cancers familiaux du sein ainsi que dans les cancers de l'ovaire. On ne retrouve pas de mutation du gène BRCA1 dans les tissus cancéreux des formes sporadiques. Plus récemment,[...]
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Écrit par
- Jean-Yves NAU
: docteur en médecine, journaliste, chroniqueur médical sur le site d'information
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