MÈDES
L'État mède
L'écrasement de la puissance assyrienne
« L'amour de la liberté les rendit excellents guerriers [les Mèdes]. Ils combattirent avec succès contre les Assyriens, repoussèrent la servitude et devinrent libres » (Hérodote, I, xcv).
L'idée qu'il était nécessaire de se réunir pour se dégager de l'emprise assyrienne faisait son chemin ; une large coalition des tribus finit par se former au cours du premier quart du viie siècle avant notre ère. L'âme de la révolte était Kachtariti ou Khchatriti, très bien connu par les textes assyriens, un descendant de Déiocès, dans lequel on reconnaît Phraorte, le deuxième roi de la dynastie mède décrite par Hérodote (env. 675 avant notre ère). La coalition est vaste ; elle dépasse largement les trois provinces créées par les Assyriens et déborde aussi bien vers le nord que vers le sud. Le roi Asarhaddon (681-669) lutte contre cette menace et cherche à démanteler la coalition par des intrigues. Ainsi, le chef scythe Partatua, le Protothyès d'Hérodote, abandonne les Mèdes insurgés et passe aux Assyriens, après avoir obtenu la main d'une princesse assyrienne. Un parti pro-assyrien s'était-il formé parmi les chefs hostiles à Kachtariti ? Toujours est-il qu'à deux reprises au moins les textes assyriens relatent l'arrivée dans la capitale assyrienne de plusieurs chefs mèdes parmi les plus éloignés, semble-t-il, donc occupant des terres sur les arrières des insurgés. Ils signent avec le roi d'Assyrie un acte par lequel ils reconnaissent sa suzeraineté et leur obligation de l'aider contre les insurgés.
Les archives d'Asarhaddon conservent de nombreuses tablettes qui portent les demandes du roi consultant l'oracle du dieu Shamash sur l'issue de ses entreprises militaires contre les coalisés. La mention des Mèdes et de leur chef Khchatriti, soutenu par les Cimmériens et les Manna, mais non par les Scythes, revient constamment. L'inquiétude du souverain illustre la gravité de la situation et une grande tension dans la lutte qui se termine par le recul de l'Assyrie et la formation d'un État mède indépendant, qui réunit sous un seul roi les nombreuses petites principautés dont les chefs formeront la noblesse mède.
Hérodote, notre source principale (pour la suite), affirme que Phraorte-Khchatriti commença à « conquérir l'Asie », s'attaqua aux Assyriens et périt avec toute son armée après un règne de vingt-deux ans. On admet que cette victoire sur les Mèdes fut remportée par les Scythes, les alliés des Assyriens, après quoi la Médie resta sous la domination scythe pendant vingt-huit ans (Hérodote, I, cvi). On ignore comment se présentait en Médie cette période de dépendance, mais puisque Hérodote affirme que les Scythes enseignèrent aux Mèdes leur tactique militaire, on peut croire que le pays sortait non pas affaibli, mais au moins capable de se libérer de cette tutelle ; ce fut l'œuvre de Cyaxare, le troisième roi mède (env. 625 av. J.-C.).
L'expansion de l'État mède, retardée par la domination scythe de plus d'un quart de siècle, reprend avec force, ce que manifeste une jeune et dynamique nation. Plusieurs petits États voisins deviennent ses vassaux. C'est sous Cyaxare sans doute aussi qu'eut lieu l'annexion du petit royaume perse. Ce peuple qui, au ixe siècle avant notre ère, est signalé au sud et à l'ouest du lac d'Urmiya quitta le nord-ouest du plateau peu de temps après (peut-être sous la pression assyrienne et urartienne qui provoqua ce mouvement) et vint s'installer au sud-ouest de l'Iran, dans le pays de Parsumash et d'Anshan, occupant les contreforts des Zagros, sur le territoire du royaume de l'Élam, plus bienveillant. Ainsi, si Phraorte-Khchatriti réalisa l'union des Mèdes, c'est Cyaxare qui porta son effort sur l'expansion « extérieure », œuvrant à[...]
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Écrit par
- Roman GHIRSHMAN : membre de l'Institut
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