MÉDIAS Sociologie des médias
Les médias et la communication politique
Sans doute l'attente première à l'égard des médias a été et continue d'être l'information quelles que soient les vicissitudes de la presse écrite et les transformations dans l'univers des médias audiovisuels et du multimédia. De l'information au politique, il n'y a qu'un pas dans la mesure où la publicisation des problèmes est un des aspects premiers des phénomènes politiques. Le politique étant indéterminé par définition, il requiert l'intervention d'individus ou de groupes pour mettre en avant certaines questions qui vont être problématisées dans la société avec le concours des médias. Les campagnes électorales constituent un moment privilégié de cette problématisation collective pour sélectionner des enjeux de politique publique sur lesquels les candidats s'affrontent avec des « projets mutuellement exclusifs ». D'où l'importance qu'a prise l'étude des campagnes électorales dans l'observation des médias et de leurs effets individuels et collectifs. On observe que la transformation des pratiques de communication et d'information politique aboutit aujourd'hui à la coexistence de théories incompatibles comme la théorie de la mobilisation cognitive selon laquelle les gouvernés profiteraient de l'extension de l'enseignement et la diffusion massive de l'information d'une part et la théorie du média-malaise selon laquelle le politique ne peut que souffrir de sa médiatisation. La logique des médias s'imposerait à la logique politique et ainsi se mettrait en place une colonisation du politique par le médiatique.
Médias et démocraties
Historiquement, les médias se sont développés dans le cadre démocratique, ce qui ne signifie pas qu'ils sont mis systématiquement à son service comme le montrent toutes les expériences de propagande. La communication de campagne électorale a été prise par Pippa Norris comme indicateur de modernisation des processus politiques qui impliquent les organisations, les médias et l'électorat. Cela l'a conduit à distinguer la phase prémoderne qui va du milieu du xixe siècle aux années 1950, la phase moderne du début des années 1960 à la fin des années 1980 et la phase postmoderne au-delà des années 1990. Cette typologie correspond approximativement à celle que Bernard Manin propose en 1995 concernant les transformations de la démocratie représentative qui voit se succéder le parlementarisme, la démocratie de partis et la démocratie du public.
Dans la phase prémoderne, les leaders sont le plus souvent des notables qui « travaillent » leur circonscription sur une base fortement localisée (meetings, porte-à-porte). Ils disposent d'un budget limité et sollicitent dans leur électorat une confiance personnelle fondée dans l'interconnaissance et des alignements sociaux et politiques stables. Les médias principaux sont la presse partisane, les affiches, les brochures puis la radio. La phase moderne est caractérisée par la nationalisation des campagnes, l'utilisation massive de la télévision, le recours aux sondages, le news management, les budgets modérés et la tendance de l'électorat aux désalignements social et partisan (discordance ici avec le type de démocratie de partis selon Manin).
Dans la phase postmoderne, les campagnes sont nationalement coordonnées et opérationnellement décentralisées. La campagne devient permanente et s'appuie sur des professionnels de l'observation de l'opinion publique. La télévision et Internet dominent le choix des médias qui connaissent une extension du news management à la politique routinisée. Les budgets s'envolent dans un contexte de désalignement social et partisan. Si avec Jay Blumler, on se concentre sur l'évolution depuis l'après-Seconde Guerre mondiale, on est amené à voir[...]
La suite de cet article est accessible aux abonnés
- Des contenus variés, complets et fiables
- Accessible sur tous les écrans
- Pas de publicité
Déjà abonné ? Se connecter
Écrit par
- Jacques GERSTLÉ : professeur à l'université de Paris-I, Centre de recherches politiques de la Sorbonne
Classification
Autres références
-
MÉDIAS (anthropologie)
- Écrit par Julien BONHOMME
- 1 394 mots
Longtemps ignorés par l’anthropologie, les médias se sont imposés comme l’un des nouveaux objets d’étude de la discipline au cours des années 1990. Les anthropologues ont pris la pleine mesure du fait que les terrains les plus isolés étaient désormais marqués par la présence de médias de toutes sortes,...
-
ABSTENTIONNISME
- Écrit par Daniel GAXIE
- 6 313 mots
- 3 médias
Les campagnes électorales sont désormais plus centrées sur les médias que sur les réunions dans les écoles et les contacts en face à face entre des militants et des électeurs. Elles sont du même coup moins mobilisatrices pour diverses fractions du corps électoral. Ces campagnes médiatiques ne sont de... -
AFRIQUE NOIRE (Culture et société) - Littératures
- Écrit par Jean DERIVE , Jean-Louis JOUBERT et Michel LABAN
- 16 566 mots
- 2 médias
– en premier lieu,la médiatisation par la radio, la télévision ou les disques et cassettes de genres oraux traditionnels, parfois quelque peu adaptés aux exigences de ces médias. De nombreux pays réservent des émissions où conteurs et artistes de la parole interprètent dans une des langues nationales... -
NUMÉRIQUE, anthropologie
- Écrit par Julien BONHOMME
- 1 440 mots
Alors que les micro-ordinateurs remontent aux années 1970 et l’essor d’Internet aux années 1990, c’est au cours de la décennie suivante que l’anthropologie du numérique acquiert sa légitimité au sein de la discipline. Contrairement aux essais sur la « révolution numérique » qui spéculent sur la rupture...
-
ANTHROPOLOGIE VISUELLE
- Écrit par Damien MOTTIER
- 4 464 mots
La démocratisation des instruments de réalisation et de production, la libéralisation des moyens de diffusion et la plus grande maniabilité des supports (VHS, DivX, DVD, fichiers numériques) ont donné une ampleur considérable aux usages communautaires des médias depuis les années 1980. Eric Michaels... - Afficher les 80 références