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BYZANCE MÉDIÉVALE 700-1204 (A. Cutler et J.-M. Spieser)

La collaboration de deux grands spécialistes de Byzance a permis la mise au point d'un livre intelligent et vivant, qui renouvelle les vues routinières sur Byzance (coll. L'Univers des formes, Gallimard, Paris, 1996).

Une brève introduction souligne quelques constantes de l'âme byzantine. La plus importante est que pour les Byzantins l'avenir était, en quelque sorte, leur passé, l'époque de Théodose et de Justinien. La seconde est la conscience de l'autre, c'est-à-dire, à partir du viie siècle, du monde arabe, si puissant et si novateur dans les arts. La troisième est la puissance des images, en termes de propagande, mais aussi d'illustration de la vraie foi et de participation au divin (icônes non faites de main d'homme, acheiropoiètoi, icônes miraculeuses).

La première partie de l'ouvrage concerne précisément la guerre des images, que fut l'iconoclasme (700-env. 900). Loin d'être un débat stérile, c'est un point de départ fondamental pour les Byzantins car il conditionne « la mise en forme de la conception qu'[ils] ont du monde et de leur propre identité ». Sous l'impulsion des moines, les images triomphèrent. Le retour à la tradition est marqué par les belles scènes extraites du manuscrit des Homélies de Grégoire de Nazianze conservé à Paris (Bibliothèque nationale de France, Ms gr. 510) et par le décor de l'abside de Sainte-Sophie de Constantinople.

Le triomphe de la tradition constitue la seconde partie. Deux pages sur le contexte économique livrent quelques estimations globales sur Byzance à l'aube du viiie siècle : huit millions d'habitants ; revenu total, 2,5 millions de nomismata (nomisma : pièce d'or byzantine), la moitié seulement de celui de l'époque de Justinien, ce qui donne la mesure des pertes subies avec les invasions arabes. L'architecture est marquée par le développement des églises privées, liées au développement de centres monastiques importants comme celui de l'Athos. Le plan en croix grecque inscrite l'emporte. L'important est la mise en place de l'iconographie posticonoclaste. Sources écrites (Photius, Léon VI, épigrammes de l'église de Pighi), objets, monnaies renouvellent la présentation de la hiérarchie des sujets et des scènes. En Cappadoce, c'est le règne des églises dites « archaïques », avec leur cycle de la vie du Christ, dont l'ordre peut être « bricolé » en raison des caractéristiques architecturales ou selon des considérations liturgiques (Kiliçlar Kilise).

À côté du décor des églises, les objets produits dans la sphère impériale nous font connaître un art luxueux, où les images bibliques ou classiques font allusion aux souverains contemporains. C'est le cas du Psautier de Paris (Ms gr. 139). Les reliques donnent lieu aussi à la création d'écrins prestigieux (croix de Nicéphore Phokas, staurothèque de Limburg-sur-Lahn, croix de Tbilissi). Les diptyques et les coffrets, religieux comme celui, très beau, de Stuttgart, ou profanes (coffret Veroli, Victoria and Albert Museum, Londres) montrent les deux sources de la culture byzantine, chrétienne et antique. Celle-ci est traitée avec un sens parodique souligné par les auteurs. Les émaux, dont la technique évolue dans le courant du xe siècle (passage du plein émail à l'émail cloisonné), et les soieries complètent cet inventaire.

La troisième partie, intitulée « vers une renaissance ? » concerne une période contrastée mais qui fut marquée par une forte démographie, une indéniable prospérité, alors même que l'État, soumis aux clauses léonines des accords commerciaux passés avec les villes italiennes, voyait ses ressources fondre peu à peu. Les attaques turques mettaient de leur côté en péril le cœur de Byzance, l'Asie Mineure. Les croisades allaient aussi marquer une[...]

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