MÉGALITHIQUE
On qualifie de mégalithique tout monument funéraire en gros appareil, ou même en blocs rocheux bruts, ainsi que de grandes pierres plantées isolément ou en cercle. On appelle parfois période mégalithique celle où l'on construisit des dolmens, puisque c'est d'eux qu'il s'agit principalement. Mais il est incorrect de parler de « populations mégalithiques » pour caractériser ceux qui édifièrent ces dolmens et il faut aussi rejeter les termes, souvent employés, de « courant mégalithique », qui prête à sourire, ou de « religion mégalithique », parce que ce genre d'architecture ne renseigne guère sur les conceptions métaphysiques de l'époque.
En vertu des usages, on ne mentionnera pas les constructions dites cyclopéennes de la protohistoire : forteresses, tombeaux, palais, etc. Mais il s'agit d'une séparation purement conventionnelle, car les grands temples de Malte ou le monument circulaire de Stonehenge se relient technologiquement et chronologiquement à la phase terminale de l'époque dolménique.
Les dolmens, ou « tables de pierre », en dépit des légendes et des interprétations romantiques, ne sont nullement des autels sacrificatoires. Les cupules et rigoles qui creusent parfois la table de couverture ne servaient pas aux libations ni à l'écoulement du sang des victimes. Tous les dolmens correctement fouillés ont, en effet, livré des dizaines et parfois des centaines de squelettes. Tombeaux ou ossuaires, ils semblent d'autre part avoir été recouverts totalement par un tumulus de terre ou de pierraille.
Protégés par les superstitions dont faisaient l'objet ces « maisons des fées », des « folles » ou des « fades », les dolmens n'en furent pas moins saccagés. Les Romains exploitèrent largement les tumulus protecteurs pour empierrer les routes et leur exemple fut suivi jusqu'à l'époque moderne. Privées de cette protection, les chambres sépulcrales devinrent la proie des chercheurs de trésor, des bergers, des curieux et des promeneurs qui venaient se divertir sur les grandes dalles comme à la « Pierre levée » de Poitiers.
Des problèmes techniques difficiles à résoudre
Les dimensions de certains tombeaux mégalithiques comme ceux de la Cueva de la Pastora (Séville), de la Tumba del Romeral (Antequera), de New Grange (Drogheda, Irlande), dont la longueur dépasse vingt mètres, ont dû poser à leurs constructeurs des problèmes techniques difficiles à résoudre. Il en est de même pour le grand dolmen de Bagneux, près de Saumur, qui servait d'écurie à une quinzaine de chevaux à la fin du xixe siècle. Beaucoup de dalles de couverture dolménique pèsent plusieurs tonnes et la plupart des supports ou piliers qui entourent la chambre et soutiennent le plafond pèsent plusieurs quintaux. Il fallait trouver ces blocs, les aménager, les transporter et ériger le tout rationnellement. Les cartes de répartition prouvent que les constructeurs de dolmens prenaient le plus souvent leurs matériaux sur place, et tout particulièrement dans les bancs de calcaire dur et bien lité. Les intéressantes fouilles de C. Burnez à Bougon (Deux-Sèvres) en ont d'ailleurs fourni la preuve directe. En pays granitique comme la Bretagne, on utilisait les blocs qui affleurent un peu partout. Mais les artisans mégalithiques ne répugnaient pas aux prouesses techniques. Les pierres bleues du grand cercle de Stonehenge proviennent des monts Prescelly, au sud-ouest du pays de Galles, distants de près de deux cents kilomètres en grande partie franchissables par voie d'eau, ce qui ne diminue pas les mérites des entrepreneurs de l'époque. Les menhirs de la bordure orientale des marais de Mont (Vendée) sont en grès de Noirmoutiers, dont le transport constitue un bel exploit. Les monuments mégalithiques postulent par conséquent une main-d'œuvre abondante, et fort intelligente, puisqu'elle[...]
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Écrit par
- Raymond RIQUET : docteur en médecine, docteur ès science, chargé de cours d'anthropologie à la faculté des sciences de Bordeaux
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