MÉMOIRE DE TRAVAIL
La mémoire de travail et sa mesure
Alors que la tradition britannique de l’étude de la mémoire de travail s’est toujours inspirée des recherches sur la mémoire à court terme, c’est par le biais d’une réflexion sur l’attention en tant que ressource cognitive que les auteurs nord-américains ont abordé la question. Selon cette approche, la mémoire de travail serait un système unitaire au sein duquel une ressource unique et limitée, conçue comme une énergie ou un espace mental, serait partagée entre les fonctions de traitement et de stockage. Cette conception, parfois confondue avec celle de Baddeley, a donné lieu à la construction d’instruments visant à mesurer la capacité de la mémoire de travail. Alors que la capacité de la mémoire à court terme se mesure en évaluant la plus longue liste de chiffres, de mots ou de lettres qu’un individu peut rappeler immédiatement après présentation (tâches d’empan simple), les tâches de mémoire de travail requièrent, outre ce maintien, la réalisation d’une tâche concurrente (tâches d’empan complexe). Dans la plus célèbre d’entre elles, la tâche d’empan de lecture, les individus doivent juger de la plausibilité de phrases qu’ils lisent à haute voix, tout en retenant le dernier mot de chacune d’elles. Cette tâche de compréhension de phrase peut être indifféremment remplacée par d’autres tâches pendant lesquelles le sujet doit conduire simultanément une opération de traitement (tâche d’arithmétique, comptage de points, simple lecture d’une suite de chiffres présentés successivement à l’écran), alors que des mots ou des lettres doivent être retenus. Le nombre maximal d’items dont un individu est capable de se souvenir dans ces conditions constitue son empan en mémoire de travail. Cette simple mesure s’avère le meilleur prédicteur de la performance dans nombre d’activités cognitives de haut niveau (apprentissage, résolution de problème, raisonnement, etc.), de l’intelligence fluide, ainsi que des performances scolaires. Les raisons de ce pouvoir prédicteur demeurent débattues.
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Écrit par
- Pierre BARROUILLET : professeur ordinaire, université de Genève (Suisse)
- Valérie CAMOS : professeure en psychologie du développement, directrice du laboratoire de développement cognitif du département de psychologie, université de Fribourg (Suisse)
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