MÉMOIRE DE TRAVAIL
Les limitations de la mémoire de travail et ses sources
Ce qui frappe avant tout est l’aspect limité de la mémoire de travail, en termes tant de durée, quelques secondes, que de taille, quelques éléments seulement. Les raisons de ces limitations demeurent l’objet de vifs débats qui prennent leur source dans des options théoriques divergentes quant à la possibilité de distinguer la mémoire de travail de la mémoire à long terme. Pour certains auteurs, la mémoire de travail maintient des représentations transitoires et éphémères distinctes de la mémoire à long terme bien qu’en relation avec elle. Ces représentations seraient sujettes aux interférences et au déclin temporel dès que l’attention en est distraite. Elles nécessiteraient donc une permanente reconstruction pour éviter leur oubli. C’est l’option défendue par Baddeley ou par le modèle de partage temporel des ressources. Pour d’autres, qui privilégient une conception fonctionnelle plus que structurelle, la mémoire de travail n’est que la partie activée de la mémoire à long terme avec, au sein de cette partie activée, un sous-ensemble d’éléments qui se trouveraient dans le focus attentionnel et seraient donc disponibles pour les traitements. Les avis divergent sur la taille de ce focus attentionnel (un seul ou quelques éléments) ainsi que sur l’existence d’un déclin temporel de l’activation. D’autres enfin optent pour une solution intermédiaire et conçoivent la mémoire de travail comme une mémoire primaire à court terme maintenant au plus quatre éléments, dont certains seraient déplacés en mémoire à long terme lors des phases de traitement, et d’où ils peuvent être récupérés avec plus ou moins de facilité. Chacune de ces options théoriques a ses propres explications concernant le nombre réduit d’éléments pouvant être maintenus, leur faible durée de vie, et l’impact que les traitements concurrents ont sur leur maintien.
Ainsi, si les fonctions de la mémoire de travail (stockage et traitement), sa mesure par les tâches d’empan complexe, son rôle dans la cognition de haut niveau, le développement cognitif et le vieillissement font l’objet d’un large consensus, sa nature, sa structure, les mécanismes précis par lesquels elle remplit ses fonctions, ainsi que les sources de ses limitations, demeurent encore à préciser.
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Écrit par
- Pierre BARROUILLET : professeur ordinaire, université de Genève (Suisse)
- Valérie CAMOS : professeure en psychologie du développement, directrice du laboratoire de développement cognitif du département de psychologie, université de Fribourg (Suisse)
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