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MÉMOIRES POUR SERVIR À L'HISTOIRE NATURELLE DES ANIMAUX (ouvrage collectif)

Une anatomie animale fondée sur une conception mécaniste du vivant

Ces Mémoires ont été conçus par un petit groupe d’académiciens, tous médecins, qui ont décidé de se tourner vers un sujet encore assez peu connu, quoiqu’il commence à susciter de l’intérêt, à savoir l’anatomie des animaux. Le plus célèbre de ces personnages est Claude Perrault (1613-1688), qui est également architecte (il est connu notamment pour avoir contribué, parmi d’autres, à la conception de la colonnade du Louvre). Assisté d’un des anatomistes les plus renommés de son temps, Joseph-Guichard Du Verney (1648-1730), et de plusieurs autres confrères, il entreprend dès les années 1660 de disséquer divers animaux, européens ou exotiques, et de rédiger des comptes rendus détaillés de ces dissections, accompagnés de planches gravées. C’est cette collection de monographies qui va former la base des Mémoires pour servir à l’histoire naturelle des animaux.

Le caméléon et son anatomie interne (1671) - crédits : Courtesy of the Smithsonian Libraries

Le caméléon et son anatomie interne (1671)

Le volume de 1671 comprend plusieurs espèces remarquables, en particulier le lion, le caméléon, le dromadaire, l’ours, la gazelle, le lynx, le castor, l’élan et le raton-laveur (appelé « coati-mondi »). Pour chaque animal, les descriptions de l’extérieur et de l’intérieur du corps sont sobres, précises, et se gardent d’aborder les questions les plus controversées, notamment celles qui concernent le mode de fonctionnement des organes. De plus, pour bien montrer qu’ils ne veulent absolument pas généraliser leurs résultats, les auteurs n’emploient pas d’articles définis dans leurs titres : ils parlent de la « Description anatomique d’un Ours », ou « de cinq Gazelles », et non « de l’Ours » ou « de laGazelle ».

Mais ce n’est pas pour autant que leur approche est totalement dénuée de présupposés théoriques. En effet, en arrière-plan, ils sont mus par une conception nouvelle qui se répand dans les sciences de la vie à la fin du xviie siècle : le mécanisme. Ainsi, la plupart d’entre eux admettent, au moins implicitement, que toutes les fonctions physiologiques peuvent s’expliquer par des lois physiques ordinaires, et qu’il n’est pas besoin de recourir à des principes vitaux particuliers ou des entités immatérielles (« âmes », « formes » aristotéliciennes…) comme on le faisait traditionnellement. Aussi pensent-ils que la description la plus fidèle et la plus rigoureuse possible de l’anatomie, c’est-à-dire de l’organisation des « machines » que sont les animaux, permettra, le moment venu, de comprendre la manière dont elles fonctionnent, même si une telle tentative est encore prématurée selon eux. Un autre aspect important de leur démarche est la dimension comparative : même si on est encore loin de l’anatomie comparée telle qu’elle sera pratiquée par Georges Cuvier (1769-1832) ou Étienne Geoffroy Saint-Hilaire (1772-1844) après 1800, on voit émerger chez Perrault et ses collègues l’idée que la connaissance de l’anatomie d’un animal est intéressante en soi, mais peut aussi éclairer celle d’une autre espèce, notamment de l’homme.

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Le caméléon et son anatomie interne (1671) - crédits : Courtesy of the Smithsonian Libraries

Le caméléon et son anatomie interne (1671)