Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

STREEP MERYL (1949- )

Une actrice romantique ?

Le Choix de Sophie (Sophie'sChoice, 1982) est un exemple type du premier cas. Le roman de Wiliam Styron est un best-seller. Mais lorsque Alan J. Pakula lui propose le rôle-titre d'une Polonaise rescapée des camps de la mort, Meryl Streep le refuse avant de revenir sur sa décision et d'écarter une rivale tchèque. Seule star au générique, elle est exactement le personnage et reçoit l'oscar du meilleur second rôle. Victime du carcan victorien, victime de la rudesse de la loi qui favorise le mâle, victime de l'holocauste, Meryl Streep suscite nécessairement la sympathie dans des films où domine l'émotion. C'est la même émotion à vif que fait passer avec force l'actrice dans A Cry in the Dark (Un Cri dans la nuit, Fred Schepisi, 1988), une histoire inspirée d'une affaire authentique où une Australienne accusée d'avoir assassiné son bébé se défend en expliquant que l'enfant a été enlevé par un chien sauvage.

L'énergie – plus qu'une conviction véritable – que déploie Meryl Streep centre la plupart de ses films sur « un très beau portrait de femme ». C'est le cas dans Le Mystère Silkwood (Silkwood, Mike Nichols, 1983), inspiré d'une histoire authentique, où elle paraît vouloir marcher sur les traces d'une Jane Fonda. L'héroïne mène son combat dans une usine de retraitement nucléaire. Gravement contaminée, elle meurt mystérieusement alors qu'elle a rassemblé toutes les preuves compromettantes... Malheureusement, comme trop souvent, l'actrice est dirigée par un réalisateur trop en deçà d'une réelle ambition.

C'est encore ce personnage volontaire que l'on retrouve dans Out of Africa (Souvenirs d'Afrique, 1985), de Sydney Pollack. Énorme machine à engranger entrées et récompenses, décors, figuration, exotisme et acteurs à l'appui, le film la montre échouant sur tous les plans. Elle n'en restera pas moins, en fin de compte, dans la solitude – même sans Robert Redford ! –, l'écrivain Karen Blixen... Fallait-il que Meryl Streep maintienne cette veine mélodramatique dans des œuvres insignifiantes comme Falling in Love (Ulu Grosbard, 1985), Plenty (Fred Schepisi, 1985), Heatburn (La Brûlure, Mike Nichols, 1986), Ironweed, la force d'un destin (Hector Babenco, 1987), même si elle apparaît dans ces derniers au côté de Jack Nicholson ?

Par la suite, Meryl Streep va changer de registre, optant pour la comédie (She-Devil/ La Diable, Susan Seidelman, 1989), le drame teinté d'humour (Postcardsfrom the Edge/Bons Baisers d'Hollywood, 1990), voire l'humour noir burlesque (DeathBecomesher/La Mort vous va si bien, Robert Zemeckis, 1992), sans résultat probant. L'action pure (The River Wild/La Rivière sauvage Curtis Hanson, 1994) est d'un moindre rendement que le retour à l'émotion à fleur de peau qui caractérise le duo qu'elle forme avec Diane Keaton dans Marvin's Room (Simples secrets, Jerry Zacks, 1996), ou avec Renée Zellweger dans One TrueThing (Contre-jour, 1998). Meryl Streep retrouve alors le mélange, perceptible à ses débuts, de la volonté de s'affirmer en tant que femme et être humain, brisé dans son élan par la crainte de faire éclater les structures sociales, conjugales et surtout familiales : une sorte de féminisme un peu velléitaire et rassurant.

Pourtant, la carrière de Meryl Streep au tournant du siècle ne se réduit pas à des rôles convenus, loin de là. Elle trouve un de ses plus grands rôles dans celui de la jeune femme qui renonce à refaire sa vie, pourtant ressentie comme terne, en suivant un photographe peut-être superficiel mais séduisant, puisqu'il s'agit de Clint Eastwood dans un de ses très grands films, The Bridges of Madison County (Sur la route de Madison, 1995). L'actrice est également admirable dans le film choral[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : critique et historien de cinéma, chargé de cours à l'université de Paris-VIII, directeur de collection aux Cahiers du cinéma

Classification

Média

<it>La Maîtresse du lieutenant français</it>, de K. Reisz, 1981 - crédits : 1981 Juniper Films/ Collection privée

La Maîtresse du lieutenant français, de K. Reisz, 1981

Autres références

  • LA GRANDE TRAVERSÉE (S. Soderbergh)

    • Écrit par
    • 1 092 mots
    • 1 média
    Le scénario met en scène une romancière new-yorkaise à succès, Alice Hughes(Meryl Streep) titulaire du prix Pulitzer pour son premier roman autobiographique, et qui est maintenant honorée d'un prix anglais encore plus prestigieux. Elle accepte de se rendre en Grande-Bretagne, à la double condition...