MÉSOPOTAMIE Les mathématiques
L’époque paléo-babylonienne
Les écoles de scribes sont probablement apparues en Mésopotamie dès les débuts de l’écriture. Mais peu de documents relatifs à l’enseignement aux IVe et IIIe millénaires nous sont parvenus. En revanche, une abondante documentation nous renseigne sur des écoles ayant fonctionné à l’époque paléo-babylonienne. Elles sont attestées dans tout l’Orient cunéiforme. Les écoles les plus prestigieuses se situaient à Nippur, la grande capitale religieuse et culturelle de la Mésopotamie antique, le lieu par excellence de la transmission de l’héritage culturel sumérien. On y apprenait encore le sumérien, langue qui avait été pratiquée en Mésopotamie au IIIe millénaire, alors qu’il avait disparu des usages courants au profit d’une langue sémitique, l’akkadien.
Les écoles de scribes à l’époque paléo-babylonienne
Encyclopædia Universalis France
À l’époque paléo-babylonienne, les écoles du Proche-Orient ancien intégraient les mathématiques dans le cursus de formation des futurs scribes. L’ enseignement en général et celui des mathématiques en particulier semblent avoir pris des formes diverses. À certains endroits, l'enseignement avait lieu dans le cadre familial et se limitait à la transmission des fondamentaux de l’art du scribe. À Nippur, où l’on a trouvé une énorme quantité de textes scolaires, dont plus de mille contiennent des exercices mathématiques, les écoles ont dû fonctionner à une échelle beaucoup plus grande. La présence de textes d’érudition, littéraires et mathématiques, laisse penser que ces écoles étaient aussi des centres de la vie intellectuelle. Un lot de tablettes de Tell Haddad (vallée de la Diyala, nord de l’Irak), qui inclut des documents administratifs, des contrats, des lettres, des tablettes scolaires mathématiques et lexicales, de la littérature sumérienne, des textes liturgiques et magiques, pourrait témoigner d’un enseignement adossé à une bibliothèque, avec une composante professionnelle tournée vers la liturgie. Dans d’autres contextes encore, par exemple dans les milieux de marchands assyriens, la formation passait essentiellement par la pratique du métier. Il pouvait arriver que des prêtres jouent un rôle dans la formation, comme le montrent les cas d’Ur et de Tell Haddad. Mais ce n’était pas toujours le cas. Certaines écoles semblent même avoir revendiqué leur indépendance par rapport au clergé, comme en témoigne ce proverbe trouvé dans des tablettes scolaires de Nippur et d’Ur : « Le scribe déchu devient prêtre. »
Liste de problèmes portant sur le creusement de tranchées. Époque paléo-babylonienne.
avec l'aimable autorisation de la Yale Babylonian Collection, Yale University ; photo Christine Proust
Les problèmes mathématiques de niveau avancé pouvaient traiter de sujets divers : dimensions des champs, transport des briques, creusement des canaux d’irrigation, stockage du grain, construction de remparts, achat et vente, bénéfices et intérêts, et bien d’autres. Ils n’étaient pas sans rapport avec les préoccupations des administrateurs en charge des travaux d’irrigation, de la production agricole ou de la gestion des institutions royales ou religieuses. De fait, les données quantitatives utilisées dans les énoncés des problèmes semblent cohérentes avec les informations trouvées dans les textes de la pratique. Par exemple, dans le problème suivant (tablette YBC 4663), qui porte sur le coût du creusement d’une tranchée, les valeurs données pour le salaire d’un ouvrier ou pour la quantité de travail journalier qu’il devait fournir correspondent aux données qu’on trouve dans les textes administratifs de la même époque et de la même région.
Tablette YBC 4663, problème 1 :
« Une tranchée. 5 ninda sa longueur, 1 ½ ninda sa largeur, ½ ninda sa profondeur, 10 gin le volume assigné, 6 še [d’argent] le [salaire journalier d’un ouvrier]. La base, le volume, le nombre d’ouvriers et l’argent [des salaires] combien ? Toi, pour le savoir :
La longueur avec la largeur fait le produit, 7:30 te donnera. 7:30 avec la profondeur multiplie, 45 te donnera. L’inverse du volume assigné[...]
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Écrit par
- Christine PROUST : docteure ès histoire des sciences, habilitée à diriger des recherches, directrice de recherche au CNRS, université Paris-VII-Denis-Diderot
Classification
Médias
L’histoire de la Mésopotamie du Sud : périodisation
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