MÉSOPOTAMIE Premier peuplement
La Mésopotamie, vaste dépression entre l'Irak et le désert syrien, est divisée en deux parties bien différentes, de part et d'autre du 34e parallèle. Si le nord (en amont de Samarra et Anah) est une plaine steppique où les cultures sèches sont possibles, le sud, que les Anciens appelaient la Babylonie, est une zone aride, où l'agriculture n'est possible que grâce à l'apport d'eau fournie par le Tigre et l'Euphrate. Il a donc fallu recourir à des techniques d'irrigation, comme dans la moyenne vallée de l'Indus ou du Khorezm, en Asie centrale.
Avant l'essor urbain
En Basse-Mésopotamie, les recherches archéologiques sont suffisamment avancées pour qu'on puisse déjà esquisser l'histoire du peuplement de cette région. Les premières étapes en présentent d'autant plus d'intérêt qu'elles expliquent peut-être le développement ultérieur d'une région qui s'est distinguée des pays voisins par un essor spectaculaire. Dès la fin du IVe millénaire, en effet, l'agglomération d'Uruk (niveau IV) renfermait de vastes bâtiments à l'ornementation sophistiquée. L'écriture sur tablettes d'argile y était pratiquée, et les documents écrits étaient scellés avec des cylindres-sceaux. Non loin de là, dans le Khuzistan (qui n'est qu'une prolongation de la plaine mésopotamienne au pied du Zagros), le pays de Suse connaissait une évolution à peu près parallèle. La Basse-Mésopotamie, aride mais irrigable, apparaît, toutes proportions gardées, comme une sorte de Californie. Cette contrée, dont le système économique général reposait sur une base fragile, dut à la dure confrontation avec un milieu hostile d'avoir été, sur bien des points, un précurseur. Or, entre les premiers établissements humains dans la région et les grandes agglomérations qui datent de la fin du IVe millénaire, il s'est écoulé peu de temps, en gros quelque deux mille ans, et l'étude archéologique de cette période est de première importance.
Les problèmes en suspens ne manquent pas. En raison de l'absence d'études sérieuses de géomorphologie ou de pédologie, on ignore où passait exactement, dans l'Antiquité, le rivage du Golfe. Il y a cinq mille ans, il était sans doute situé 150 kilomètres plus au nord de la rive actuelle. Les quantités d'alluvions transportées et déposées par le Tigre et l'Euphrate sont considérables, mais l'érosion éolienne ne l'est pas moins. Les sites les plus anciens sont-ils enfouis sous une épaisse couche d'alluvions ? Les ruines présentes ne sont-elles que des vestiges très érodés de sites jadis beaucoup plus importants ? Les cours actuels du Tigre et de l'Euphrate sont-ils très éloignés des tracés antiques ? Autant d'interrogations.
En Basse-Mésopotamie, on ne connaît pas de sites plus anciens que ceux du milieu du VIe millénaire. Jusqu'à plus ample informé, on peut donc considérer que la région ne fut pas habitée avant cette date. D'où venaient les premiers colons ? Nous savons qu'ils connaissaient la vaisselle en terre cuite. Si l'on se fie aux comparaisons que l'on peut établir entre le matériel céramique de deux sites explorés par la fouille (Eridu et Oueili), quelques poignées de tessons ramassés en surface dans la région d'Uruk, et le matériel de certains sites de l'Irak central (Choga Mami), on est amené à supposer que les premiers agriculteurs de la Basse-Mésopotamie venaient du centre du pays et qu'ils se sont déplacés à la phase tardive de l'époque dite de Samarra, durant la seconde moitié du VIe millénaire. Il n'est pas indifférent de constater que, selon certains auteurs, le premier exemple d'irrigation par canal apparaît en Irak central, à Choga Mami justement, près de Mandali. Certes, il ne s'agit[...]
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Écrit par
- Jean-Louis HUOT : professeur d'archéologie orientale à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne
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