MESURE, musique
Une œuvre musicale s'inscrit dans le temps, et la musique est un art temporel ; l'importance de la perception du temps en musique se comprend aisément si l'on fait une comparaison avec les arts plastiques. En regardant un tableau, on a la possibilité de voir dans l'instant l'ensemble de la toile, donc de prendre connaissance simultanément de ses composantes. Cela est impossible dans l'écoute d'une œuvre musicale qui est perçue comme une succession continue ou discontinue d'instants sonores reliés entre eux par des rapports de hauteur, de durée et d'intensité. Le rythme est fait de relations de durées, mais aussi de relations d'intensités (accents réguliers ou irréguliers). La durée dans laquelle se développe une musique est le temps musical, et ce temps peut être mesuré ou non mesuré, c'est-à-dire divisé ou non en parties égales.
Temps mesuré et temps non mesuré ont coexisté, à travers les siècles et les continents, dans la musique ; le premier, plus fréquent, fut souvent en rapport avec la musique de danse ou d'accompagnement du travail, qui demande des rythmes régulièrement accentués ; le second, généralement relié à la musique vocale (prosodie), et à certaines formes d'improvisation individuelle ou collective, est rare dans la musique classique d'Europe occidentale, mais par contre très employé par les compositeurs contemporains. La mesure, ou division en parties régulières du temps musical, a pris des formes différentes selon l'époque et le lieu ; sa manifestation la plus élémentaire et la plus universelle est un battement isochrone, marqué ou non par une frappe d'instrument à percussion, des claquements de mains ou le battement du pied sur le sol ; c'est à l'intérieur de ce cadre régulier que se déploie, d'une façon plus ou moins libre et complexe, le rythme. Dès que la mesure prend la forme d'un groupement de durées, les deux grands types sont le binaire et le ternaire. Dans la musique occidentale classique, la mesure comprend différents types de groupements d'un nombre donné d'unités de durée ; elle est subdivisée en temps égaux qui sont l'équivalent du battement isochrone.
Conception européenne de la mesure
Le système classique
Dans la musique classique occidentale notée avec une assez grande précision, la partition d'une œuvre est divisée en parties égales par des barres de mesure ; les valeurs, notes ou silences, comprises entre ces barres constituent la mesure ; celle-ci comprend un nombre fixe (généralement entre deux et sept) de subdivisions appelées temps. Un chiffrage, au début de l'œuvre, indique sous forme de fraction le nombre de valeurs contenues dans la mesure (numérateur), et la durée de chaque valeur en fraction d'une unité de durée (dénominateur). L'unité de durée est la ronde et ses subdivisions binaires usitées comme unités pour les mesures vont de la moitié (blanche ) au trente-deuxième (triple croche ). Dans les mesures dites simples, chaque temps est divisible par deux, donc équivaut à la ronde ou à une de ses subdivisions, et le numérateur du chiffrage coïncide avec le nombre de temps : une mesure à 4/4, par exemple, contient quatre temps valant chacun un quart de ronde, soit quatre noires . Dans les mesures dites composées où chaque temps est divisible par trois (temps ternaire), la valeur du temps est une ronde ou une de ses subdivisions à laquelle on ajoute la moitié de sa durée ; dans le chiffrage de ces mesures, le numérateur représente des tiers de temps : la mesure à 9/8 par exemple contient 9/8 de ronde, soit 9 croches, et trois temps valent chacun trois croches, soit une noire pointée. (Le point ajoute à une valeur la moitié de sa durée normale.)
Des gestes conventionnels du bras permettent de donner une représentation visuelle de[...]
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Écrit par
- Pierre-Paul LACAS : psychanalyste, membre de la Société de psychanalyse freudienne, musicologue, président de l'Association française de défense de l'orgue ancien
- Nicole LACHARTRE : compositeur, fondatrice et directrice artistique de l'Association pour la collaboration des interprètes et compositeurs
Classification
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