MESURE Vue d'ensemble
Une mesure scientifique est une opération qui associe un ou plusieurs nombres aux caractéristiques d'un phénomène d'apparence bien définie. Pour qu'elle ait un sens, il convient que cette association puisse être menée de manière reproduisible et suffisamment précise. La mesure est une étape essentielle de la mathématisation du réel associée à la démarche scientifique. Si l'on excepte le simple dénombrement d'objets, cette opération nécessite la définition d'une unité (ou échelle) de mesure, généralement adoptée par convention. Les notions d'erreur et d'incertitude sont intrinsèquement liées à celle de mesure.
Née il y a quatre à cinq mille ans dans l'ancienne Égypte et la civilisation sumérienne, la science de la mesure est indissociable des progrès de la connaissance du monde matériel, et s'affine tout au long de l'Antiquité et du Moyen Âge. La métrologie moderne se développe à partir du xve siècle. Dans la Docte Ignorance (1440), Nicolas de Cues déclare que la mesure est la clé de la physique et l'acte propre de la raison appliquée à connaître la nature. Les décennies qui suivent voient Léonard de Vinci et de nombreux inventeurs fonder une métrologie expérimentale. En 1595, Simon Stevin propose l'unification des mesures sur le système décimal. Les instruments de mesure fondamentaux apparaissent au xviie siècle dans la forme que l'on connaît encore de nos jours : balance de précision, microscope, horloge à balancier... Le xviiie siècle est marqué par les premières mesures électriques et la naissance du système métrique français ; le siècle suivant dote la science classique d'instruments de mesure raffinés dans tous les domaines. L'essor de l'électronique et les techniques d'affichage numérique modifient considérablement les méthodes de mesure au xxe siècle.
Après l'extrême diversité des unités de mesure utilisées jusqu'au xviiie siècle, la commodité d'une définition universelle a convaincu un nombre croissant d'utilisateurs, qu'ils soient marchands ou scientifiques. Les premiers étalons furent définis avec précision à partir de grandeurs universelles comme le méridien terrestre et le jour solaire. Conservés avec soin dans un lieu sûr, ils définissent les unités de base (mètre, seconde, kilogramme). Le passage d'une définition à une autre permettra d'améliorer progressivement la précision. Ainsi en 1889, le kilogramme devient, au lieu de la masse du décimètre cube d'eau pure, celle d'un prototype en platine iridié déposé au pavillon de Breteuil, à Sèvres. Signe de l'évolution des modes scientifiques, l'unité de mesure du temps est passée d'un phénomène aisément observable à un processus microscopique. Ainsi, alors que la durée moyenne du jour constituait auparavant l'étalon de temps, on définit depuis 1967 la seconde comme la durée de 9192631770 périodes de la radiation correspondant à la transition entre les deux niveaux hyperfins de l'état fondamental de l'atome de césium 133. Quant à l'unité de longueur, c'est sans doute celle dont la définition a le plus évolué. Le mètre a d'abord été défini à partir du méridien terrestre, puis représenté par un prototype unique déposé au pavillon de Breteuil. On a adopté ensuite une définition issue de la physique atomique (un multiple de la longueur d'onde d'une radiation émise par un atome de krypton), pour finalement le relier en 1983 à la vitesse de la lumière, le mètre se définissant désormais comme la longueur du trajet parcouru dans le vide par la lumière pendant une durée de 1 /299792458 de seconde. Cette définition revient en fait à le considérer comme une grandeur dérivée de l'unité de temps, la vitesse de la lumière jouant le rôle central que lui donne la théorie de la relativité.[...]
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Écrit par
- Bernard PIRE : directeur de recherche émérite au CNRS, centre de physique théorique de l'École polytechnique, Palaiseau
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