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MESURES, économie

La neutralité de la mesure

Mesure et concept

La mesure économique, même au niveau le plus élémentaire, suppose l'identification préalable de l'objet à mesurer, grâce à un ensemble de caractéristiques objectives qui permettent de le définir sans ambiguïté, donc de le retrouver dans le temps et dans l'espace. L'objet, pour être mesuré, est d'abord conceptualisé, interprété de façon nécessairement abstraite.

Cette démarche n'est pas particulière à l'économie : les mesures physiques, par exemple, s'appuient tout autant sur des interprétations abstraites de ce que nous percevons (forces, masses, tensions, températures...). La difficulté naît de ce que le concept économique est souvent désigné par un mot d'usage courant : prix, salaire, vente, consommation sont associés à des réalités quotidiennes. Il peut en résulter l'idée que les concepts désignés par ces mots sont l'expression directe d'une réalité intangible, évidente. Par là, la mesure qui s'appuie sur des concepts aussi évidents prend un aspect de vérité indiscutable, absolue.

Mais il faut admettre que chaque concept est une construction abstraite, résultant de l'interprétation du fait économique brut constaté. Cette interprétation repose, de façon plus ou moins explicite, sur une vision théorique des mécanismes économiques, dont la logique propre détermine la définition du concept mesuré. Sans englober l'ensemble du domaine économique, cette vision théorique peut n'être qu'embryonnaire, partielle : elle n'en existe pas moins comme facteur déterminant dans la définition du concept.

Si l'on veut, par exemple, mesurer l'évolution des salaires, on utilise un terme auquel la plupart des gens associeront spontanément un élément précis de leur vie quotidienne. Rien ne garantit a priori que ces interprétations individuelles seront identiques. En effet, on peut retenir au moins deux définitions du salaire : le salaire brut, qui comprend les sommes effectivement perçues par le salarié et les cotisations sociales à la charge des salariés (ces dernières étant versées directement par l'employeur aux caisses de Sécurité sociale), ou bien le salaire net, qui ne comprend que les sommes effectivement perçues par le salarié (après déduction des cotisations sociales). Si l'on s'intéresse en priorité au comportement des salariés et que l'on considère qu'un élément important de ce comportement est le revenu dont ils peuvent effectivement disposer pour consommer ou épargner, on choisira de mesurer les salaires nets ; si l'on donne en revanche la priorité au comportement des employeurs et à l'influence des charges salariales sur ce comportement, il sera préférable de mesurer des salaires bruts.

Le choix de l'unité de mesure

Une fois défini le concept dont la mesure doit fournir une expression quantitative, il faut choisir l'unité dans laquelle on opérera. Cette demande peut sembler saugrenue, tant l'unité de mesure paraît évidente : dans l'exemple des salaires cité plus haut, l'unité monétaire apparaît incontestable. Ce cas n'est pas unique, ce qui est normal dans un système économique très largement dominé par l'échange marchand. Il ne faudrait pas, pour autant, en déduire que toute mesure en économie se fait à l'aune de l'unité monétaire.

De bons contre-exemples peuvent être trouvés dans l'analyse de la sphère productrice de l'économie. Ainsi, la production d'électricité peut aussi bien être mesurée en kilowattheures qu'en euros. On comprend que le choix de l'unité de mesure ne peut être fait au hasard : il est cohérent avec la logique d'observation de la production électrique. Si on l'observe dans le cadre d'une étude sur la rentabilité financière d'une centrale électrique, on la mesurera en[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École polytechnique, administrateur de l'I.N.S.E.E., chef de la division des concepts et définitions statistiques et comptables de l'I.N.S.E.E.
  • Encyclopædia Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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