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MÉTHODE SCIENTIFIQUE

Les voies de la découverte

Les généralités descriptives se présentent communément sous la forme de versions assouplies et enrichies de la méthode proposée par Claude Bernard : à l'observation, l'expérience et l'hypothèse on ajoute le choix d'une question, la nécessité d'interpréter les résultats, l'importance de l'argumentation et l'on insiste sur les essais et les erreurs, les fausses pistes, les retours en arrière qui interviennent dans la vie scientifique. Plus proches de la réalité du travail des scientifiques, ces versions s'éloignent de ce que l'on entend ordinairement par méthode, destinée précisément à éviter d'errer et de tâtonner en suivant un ordre défini d'opérations. Dans leur complexité affectée, elles substituent l'image d'un aimable désordre à l'ordre figé qu'elles contestent. Or l'activité d'un scientifique ne consiste pas à faire n'importe quoi : elle est finalisée. Si les voies de la découverte sont impénétrables, elles révèlent après coup leur secrète convergence.

De ce point de vue, l'étude précise d'un épisode de l'histoire des sciences est toujours instructive. Dans L'ADN, le secret de la vie, James Watson, qui obtint en 1962, avec Francis Crick et Maurice Wilkins, le prix Nobel de physiologie ou médecine pour la découverte, en 1953, de la structure en double hélice de l'ADN, relate les étapes de son travail. Dans son récit, trois points sont à relever. D'abord, la concurrence entre les laboratoires, qui témoigne de la dimension collective de la recherche scientifique moderne, au point qu'il est délicat d'attribuer une découverte à quelqu'un. Ensuite, des chercheurs de premier plan peuvent avoir des styles différents : les uns sont portés vers les spéculations, d'autres vers les faits, les uns modélisent, d'autres préfèrent expérimenter. Enfin, le modèle de l'ADN, au moment de sa publication, est cohérent chimiquement et biologiquement, et rend compte de l'ensemble des faits connus, mais n'a reçu aucune confirmation expérimentale ; celle-ci n'interviendra que cinq ans plus tard.

De tels récits permettent de nombreuses remarques méthodologiques. Mais celles-ci sont-elles ou non généralisables ? Permettent-elles d'établir les grandes lignes de la méthode suivie par les savants ? Ce problème, celui de l'établissement d'une loi universellement valable à partir d'une série d'observations, est celui de l'induction. Or il se trouve qu'il constitue un des problèmes majeurs de la réflexion sur les méthodes scientifiques. En assurant que son hypothèse est confirmée par l'expérience de Meselson et Stahl, Watson le rencontre sans le traiter. Parce que le déroulement de la réplication est conforme au pronostic de Crick et Watson lors de cette expérience, peut-on en conclure qu'il en est et en sera toujours ainsi, sans exception, sans ambiguïté, et sans variation ? Leur hypothèse est-elle confirmée par l'expérience ou simplement renforcée ? La réplication de l'ADN s'effectue-t-elle selon un processus unique ?

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