PROJECTIVES MÉTHODES
Méthodes projectives et psychologie projective
Dégager une conclusion d'ensemble sur l'importance réelle, l'influence et la validité des techniques projectives est une tâche impossible : le volume des articles et ouvrages publiés interdit pratiquement au spécialiste de tenir à jour une documentation complète ; on y rencontre les opinions les plus extrêmes et les plus contradictoires allant du zélateur enthousiaste au détracteur passionné ; il est probable d'ailleurs que ces méthodes ne sont pas de celles qui attirent spontanément les esprits portés à la recherche expérimentale et objective.
On peut se faire une idée de l'importance effective de l'utilisation concrète de ces techniques à partir d'une enquête de Sundberg (1961), qui estimait que le test de Rorschach était administré aux États-Unis à un million de personnes par an au moins ; ce qui exigeait approximativement cinq millions d'heures de travail de psychologues cliniciens (l'équivalent de 571 années), le coût total incombant aux patients étant d'environ 25 millions de dollars.
Le recensement de la bibliographie en langue anglaise fait apparaître à la fin de 1968 un total de 3 747 références concernant le seul test de Rorschach avec un accroissement actuel d'environ 120 références par an. Il faut toutefois signaler un déclin relatif de la popularité des techniques projectives dans leur ensemble. Parmi les 689 références (en langue anglaise) relevées avant 1939 dans le domaine des tests de personnalité, 26 p. 100 concernaient les techniques projectives. Cette proportion alla ensuite en augmentant régulièrement, atteignant un maximum de 66,1 p. 100 en 1951. Depuis 1955, elle n'a cessé de décroître pour tomber aux environs de 27 p. 100 en 1968 (chiffres empruntés à O. K. Buros).
Ces chiffres semblent bien indiquer qu'un certain engouement pour les techniques projectives correspondait à une époque aujourd'hui dépassée de la psychologie clinique. Certaines prises de position hostiles sont significatives, telle celle de A. R. Jensen (université de Californie, Berkeley), qui ne craint pas d'écrire, en 1965, « qu'il ne semble pas déraisonnable de recommander que le Rorschach soit complètement abandonné en pratique clinique et qu'on n'exige plus des étudiants en psychologie clinique de gaspiller leur temps à apprendre cette technique [...]. En attendant, le développement du progrès scientifique en psychologie clinique pourrait bien se mesurer à la vitesse à laquelle elle se débarrassera définitivement du Rorschach ».
Il est donc bien certain que les travaux et recherches sur ces techniques ne sont pas parvenus à convaincre la totalité des psychologues de leur validité. Il est évident aussi, et cela est regrettable, que la vaste littérature sur les tests de personnalité n'a pas encore réussi à constituer un corps de connaissances homogène et cohérent, qui soit acceptable par la majorité des spécialistes.
Il serait néanmoins injuste et erroné de s'en tenir à un verdict aussi sévère et aussi peu nuancé. D. Anzieu a justement souligné que l'importance de ces techniques réside ailleurs qu'en un souci de rigueur dans l'administration de la preuve et qu'elles ont suscité une nouvelle façon de pratiquer la psychologie : cette psychologie projective déborde la simple construction ou application de tests, mais tire son origine de leur découverte. « Jusqu'à cette découverte, le chapitre final sur la personnalité, dans les manuels de psychologie, était remarquablement vide. Mis à part les paragraphes sur la classification des caractères, laquelle remonte à l'Antiquité grecque, et ceux consacrés aux influences sociales, lesquelles furent découvertes par l'école sociologique française [...], ce chapitre se réduisait à l'analyse philosophique des fonctions du moi [...]. Si maintenant on commence à penser[...]
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Écrit par
- Jacques PERSE : assistant de recherche au C.N.R.S., directeur du laboratoire de psychologie de la clinique des maladies mentales et de l'encéphale à l'université de Paris-V
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