METSYS ou MASSYS QUENTIN (1465/66-1530)
À la différence de tant d'autres peintres nordiques des xve et xvie siècles, Quentin Metsys ne fut jamais oublié et, cas rarissime, était encore considéré en pleine époque baroque comme un très grand peintre dont le souvenir restait intact (cf. les biographies si louangeuses de Fickaert, en 1648, et de Fornenbergh, en 1658). Plus personne ne saurait contester aujourd'hui, à la suite du chroniqueur Giucciardini, de Molanus et de Lampsonius, tous auteurs du xvie siècle, que Metsys était originaire de Louvain et qu'il y reçut même sa première formation avant d'apparaître, en 1491 seulement, sur les registres de la gilde de Saint-Luc à Anvers. À cet égard, le milieu encore assez fermé et traditionaliste de Louvain, durablement marqué par Hugo van der Goes et Dieric Bouts, dont l'atelier était maintenu et prolongé par le fils de ce dernier, Albert (fut-il le maître de Metsys ?), semble bien avoir exercé une influence efficace sur le jeune Metsys. Le père de Metsys était ferronnier, et il est possible (mais non prouvé) que le jeune Quentin ait dû un moment continuer le travail paternel. Quoi qu'il en soit, l'existence artistique du peintre commence en 1491 et se localise tout entière à Anvers. Chose curieuse, Metsys, qui deviendra l'une des célébrités anversoises, ne paraît jamais avoir reçu de commandes de la ville. Ses deux principaux retables ont une autre origine : celui de Sainte Anne (1507-1509, aujourd'hui à Bruxelles) provient d'une confrérie de l'église Saint-Pierre de Louvain (ce qui confirme les relations étroites de Metsys avec Louvain) ; celui de la Déploration du Christ (1508-1511, musée d'Anvers) émane de la corporation des menuisiers de cette ville. Sans doute marié peu après 1491, Quentin est veuf en 1507 et se remarie en 1508, ayant chaque fois plusieurs enfants. On ne sait au juste de quel lit sont issus ses fils Jan et Cornelis qui, jusqu'en 1531 en tout cas, ont travaillé dans l'atelier paternel ; Jan, notamment, tout au moins dans ses débuts, paraît avoir souvent copié, répété ou même complété des œuvres de son père (ainsi Saint Jérôme du Prado, et peut-être la Vieille Femme monstrueuse de Londres, qui garde le souvenir d'une œuvre perdue de Quentin en pendant au Vieillard de 1513, conservé au musée Jacquemart-André à Paris).
Peu d'œuvres de Metsys se laissent situer avant les grands retables des années 1500. Néanmoins, les deux Vierge de Bruxelles et le Saint Christophe d'Anvers, par leur massivité austère et leur coloration sombre, ont un caractère brugeois traditionnel qui permet de les dater avant 1500 en se reportant à David et à Bouts. Gardant la rigueur d'organisation de la première période, recourant à des schémas décoratifs contraignants (de Weyden dans la Pietà d'Anvers, de Léonard dans la Vierge à l'Enfant de Poznan, de Van Eyck dans le Prêteur du Louvre), après 1500, Metsys porte avant tout ses efforts et ses talents sur l'exécution picturale et parvient à une véritable « révolution tranquille » par un raffinement technique inouï, par une délicatesse de tons inégalée, par la suavité des couleurs transparentes et quasi aquarellées, qui signifient un nouvel art de peindre : le rendu illusionniste et infiniment virtuose des objets (ainsi le miroir néo-eyckien du Prêteur du Louvre, de 1514), la subtilité des lointains et le rendu de la profondeur et de l'atmosphère, la calme et fine observation des visages modelés avec tact ; autant de triomphes picturaux qui révèlent, non pas un grand inventeur formel, mais un exécutant incomparable qui permettra les futures expressions si riches d'avenir de la nature morte, du portrait et du paysage (ainsi dans la Crucifixion d'Ottawa ou dans la Pietà du Louvre). En Metsys, peintre de la douceur et de la technicité, éclectique raffiné[...]
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Écrit par
- Jacques FOUCART : conservateur des Musées nationaux, service d'études et de documentation, département des Peintures, musée du Louvre
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Médias
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