MEXICO
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La ville-région
À partir des années 1980, la croissance de Mexico s’infléchit. Le taux de croissance tombe de 4 % par an pour la période 1940-1980 à 1,8 % pour 1990-2000, un taux inférieur à la moyenne nationale. À la baisse de la fécondité et au vieillissement de la population s’ajoutent les effets de la crise économique et financière de 1982 (chute des prix du pétrole) et du tournant néolibéral (privatisations, réforme de l’État, décentralisation) qui pénalisent l’économie urbaine métropolitaine, détournant les flux migratoires vers les villes moyennes et la frontière avec les États-Unis où se localise l’industrie maquiladora (usines de montage étrangères). On observe une perte relative du poids de la métropole dans l’économie mexicaine. La fermeture, en 1991, de la raffinerie d’Azcapotzalco enserrée dans le tissu urbain a symbolisé le processus de désindustrialisation de la capitale, perceptible dès les années 1970. La disparition de milliers de petits établissements (3 000 depuis 1990), le départ de l’industrie automobile exportatrice vers le nord, et l’interdiction des activités polluantes et dangereuses provoquent l’explosion de l’informalité dans l’industrie de la sous-traitance (textile, électronique) et la prolifération de la vente ambulante, tout particulièrement dans le centre historique doublement éprouvé par le transfert, en 1982, des halles de la Merced à Iztapalapa et le séisme de 1985.
Pour autant, la perte d’attractivité de la métropole ne freine pas l’étalement urbain, alimenté par des mouvements de population au sein de l’espace métropolitain, du centre vers les périphéries. Dans le DF, alors que la ville centrale n’a cessé de perdre de ses habitants (1,2 million entre 1970 et 2000), la pression foncière s’exerce sur ses marges. Au sud-Ouest, sur les flancs du volcan Ajusco, comme au sud-est dans les réserves de protection écologique, l’urbanisation illégale mord sur les terres agricoles de Milpa Alta ou encore sur les zones de chinampas (hortillonnages) de Xochimilco. À l’opposé, après avoir englobé au sud les anciens villages de San Angel, Coyoacán, Tlalpan, l’urbanisation gagne la zone ouest où se multiplient les enclaves résidentielles et les tours de luxe comme dans la délégation (arrondissement) de Cuajimalpa, provoquant de violents conflits environnementaux, en raison de la déforestation massive des zones protégées.
Cependant, la croissance la plus spectaculaire demeure celle des périphéries populaires qui s’étendent toujours plus loin à l’est et au nord dans l’État de Mexico, où la législation est plus permissive. À partir de 1995, la population rassemblée dans les municipalités conurbées dépasse celle du DF. Dans un paysage semi-aride et poussiéreux des terres asséchées de la vallée de Mexico, les lotissements irréguliers poursuivent leur avancée, sur la route de Puebla (Los Reyes, La Paz, Chalco ou encore Chimalhuacán avec ses 700 000 habitants), sur celle de Querétaro (Tlalnepantla de Baz) et sur celle de Pachuca (Ecatepec devenue la municipalité la plus peuplée avec 1,6 million d’habitants en 2020).
Dans les années 2000, l’étalement extrême se poursuit, non plus seulement selon les modalités de l’occupation et de l’autoconstruction, mais par la production massive de lotissements géants (conjuntos habitacionales) de petites maisons (40 mètres carrés), en accession à la propriété, uniformisant le paysage urbain, au nord et à l’est de la métropole. À destination des classes populaires, ces logements d’intérêt social sont produits en série par milliers – au nombre de 20 000 dans le lotissement de San Buenaventura, à Ixtapaluca –, par les grandes entreprises de promotion immobilière qui ont saisi les opportunités données en partie par la privatisation des terres collectives en 1992 et les aides de l’État fédéral (Duhau & Jacquin, 2008).[...]
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Écrit par
- Fernando BENITEZ : éditeur et ancien professeur de journalisme à l'université nationale autonome du Mexique
- Marie-France PRÉVÔT-SCHAPIRA : géographe, professeure émérite à l'université de Paris-VIII, Creda-UMR 7227
- Sergio SARMIENTO : vice-président de Televisión Azteca à Mexico, ancien rédacteur en chef chez Encyclopædia Britannica Publishers, Inc., à Mexico
Classification
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