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POLLAK MICHAEL (1948-1992)

Né à Vienne, Michael Pollak a suivi ses études de sociologie à Linz. Installé à Paris en 1971, il a entrepris un doctorat, sous la direction de Pierre Bourdieu, dans le cadre de la VIe section de l'École pratique des hautes études, devenue depuis lors l'École des hautes études en sciences sociales. Dans ce travail, il s'est intéressé aux conséquences de la politique scientifique sur le devenir de la sociologie et de l'économie (Les Incidences de la politique scientifique sur l'évolution du champ scientifique : le cas de la sociologie et des sciences économiques en France, E.H.E.S.S., Paris, 1975). Parallèlement, il était chargé, dans le cadre de l'O.C.D.E., d'un travail de documentation et d'analyse sur les sciences sociales en France qui a fourni la base aux réflexions et au diagnostic des trois experts sollicités : le politologue Stanley Hoffmann, l'économiste Vassili Leontieff et le psychologue social Henry Tajfel (La Politique des sciences sociales : France, O.C.D.E., Paris, 1975). Cette étude, qui abordait un domaine sensible – les sciences sociales ayant été, comme l'on sait, profondément affectées par la crise de 1968 en France – a soulevé dans la communauté scientifique des réflexions et des controverses : la sévérité souvent contestée du jugement des experts a indûment rejailli sur la personne de Michael Pollak, dont le travail de documentation avait été jugé d'excellente qualité par les experts eux-mêmes.

Cet épisode devait montrer à la fois les éminentes qualités de Michael Pollak comme chercheur (rapidité de l'analyse, capacité de synthèse, concision de l'écriture) et ses difficultés initiales pour pénétrer le monde officiel de la recherche en France. C'est seulement en 1980 qu'il entre au C.N.R.S. Son œuvre, poursuivie au sein de l'Institut d'histoire du temps présent du C.N.R.S. et du Groupe de sociologie politique et morale (E.H.E.S.S.-C.N.R.S.), s'articule autour de trois grands thèmes : la politique des sciences sociales et la sociologie des sciences ; l'expérience concentrationnaire ; l'homosexualité et le sida. Ces deux derniers thèmes ont en commun la préoccupation de l'identité et de ses moyens de défense dans des situations extrêmes. Sur chacun de ces thèmes, il a su bénéficier de l'apport des trois cultures auxquelles il appartenait : la culture germanique (sous sa variante autrichienne, très ouverte sur le monde anglo-saxon), la culture française et, grâce à de nombreux séjours aux États-Unis, la culture anglo-saxonne.

Le premier thème a donné lieu à de nombreuses publications sur la planification, l'organisation, l'histoire comparative des sciences sociales, notamment sur les efforts de Paul Lazarsfeld, présentés sous un titre percutant certes, mais excessif (« Paul F. Lazarsfeld, fondateur d'une multinationale scientifique », in Actes de la recherche en sciences sociales, no 25, 1979). Son souci d'analyser les conséquences des décisions politiques dans le domaine scientifique et technique le conduit à de nombreux travaux, en collaboration avec Dorothy Nelkin, sur les risques et les prises de décisions technologiques, particulièrement dans le domaine du nucléaire. Il étudie aussi l'idéologie de l'establishment nucléaire et des mouvements antinucléaires en France et en Allemagne. Pour la sociologie de la science proprement dite, il donne en 1984 à l'Encyclopædia Universalis un article (« Sociologie de la science », in Symposium) dans lequel il analyse avec beaucoup de finesse le passage de l'épistémologie prescriptive aux descriptions socio-historiques sur la science, sans exclure que le balancier puisse repartir dans l'autre sens. Le même thème est repris sous une forme plus développée en anglais (« From Methodological Prescription to socio-historical[...]

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Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, agrégé de l'Université, directeur de recherche au CNRS

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