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TIPPETT MICHAEL (1905-1998)

Un musicien de notre temps

Dès ses trois premiers quatuors à cordes (1935-1944, 1943, 1946), Tippett montre un style très personnel, dans lequel la polyphonie joue un rôle déterminant, tout en conservant à la phrase musicale un lyrisme et un sens du rythme naturellement dansant. On dénote une parenté certaine avec la musique de Purcell, notamment dans le Quatuor no 2. Le Quatuor no 3 est marqué par l'ombre de Beethoven, qui planera sur de nombreuses œuvres ultérieures. Mais dans A Child of our Time, Tippett se réfère d'une curieuse manière aux passions de Bach, en substituant aux chorals luthériens des negro spirituals. Le message de paix et de réconciliation de l'homme avec lui-même se développe dans ses opéras. Il se révèle comme un orchestrateur hors pair dans des œuvres comme les Rituals Dances from The Midsummer Marriage, pour chœur ad libitum et orchestre (1953, commande de Paul Sacher pour son Orchestre de chambre de Bâle), la Fantaisie concertante sur un thème de Corelli, pour cordes (1953), ou le Concerto pour piano (1953-1955), toutes traversées par un souffle puissant, avec des couleurs brillantes et une polyrythmie débordante, dans un langage qui reste essentiellement tonal.

Michael Tippett et Adrian Boult - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty Images

Michael Tippett et Adrian Boult

À la fin des années 1950, notamment avec la Symphonie no 2 (1956-1957), Tippett s'échappe de ce cadre pour pratiquer un contrepoint dissonant, plus austère. Toute trace d'expression néo-romantique s'efface derrière un classicisme pur, d'expression résolument moderne. Le lyrisme de son écriture vocale se transforme en une déclamation directe. C'est l'époque de son deuxième opéra, King Priam, qui trouve son prolongement instrumental dans le Concerto pour orchestre (1963), véritable pendant moderne du concerto grosso baroque. La cantate The Vision of St Augustine, pour baryton, chœur et orchestre (1963-1965) – créée par Dietrich Fischer-Dieskau le 19 janvier 1966 sous la direction du compositeur – relève de la même approche.

Dans une troisième manière, Tippett revient à une musique luxuriante et profondément poétique, où foisonnent les idées les plus diverses. La Symphonie no 3 (1970-1972), avec soprano solo, est une vaste fresque qui cherche à mettre en lumière l'utopie du poème de Schiller mis en musique par Beethoven dans son Hymne à la joie : l'œuvre est truffée de citations, de références au blues et à Martin Luther King. Les Songs for Dov, pour ténor et petit orchestre (1969-1970) relèvent de la même approche, avec un espoir de rédemption dans le blues et le jazz. L'axe lyrique de cette période est The Knot Garden, un opéra où Tippett « raconte les amours et les haines de sept personnes dans l'Angleterre d'aujourd'hui. » (le musicien Dov est précisément l’un d’eux).

À partir du milieu des années 1970, il s'oriente vers une écriture plus abstraite et plus concise : Symphonie no 4 (1977) – créée par Georg Solti à la tête de l’Orchestre symphonique de Chicago le 6 octobre 1977 –, Triple Concerto pour violon, alto et violoncelle (1978-1979), Quatuor no 4 (1979), Sonate pour piano no 4 (1979). Comme toujours, un opéra constitue la synthèse de cette période, The Ice Break, réflexion sur les problèmes liés aux différences sociales, raciales ou aux différences d'âge. On peut voir dans les trois grandes œuvres de la dernière décennie – l'oratorio The Mask of Time (1981-1984), l'opéra New Year (1985-1988) et la fresque pour orchestre The Rose Lake (1994) – un résumé de ces approches, avec un clin d'œil à la comédie musicale dans la première. À une époque où l'enjeu de la création musicale se résumait au conflit entre les tenants du modernisme postwébernien et les adeptes de la tonalité, Tippett a trouvé une troisième voie qui n'invente rien mais qui parle avec force la langue de son temps. On lui doit de nombreux écrits résumant[...]

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Écrit par

  • : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France

Classification

Médias

Ralph Vaughan Williams - crédits : Ron Burton/ Hulton archives/ Getty Images

Ralph Vaughan Williams

Michael Tippett et Adrian Boult - crédits : Erich Auerbach/ Hulton Archive/ Getty Images

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