BRÉZILLON MICHEL (1924-1993)
Directeur des Antiquités puis inspecteur général de l'Archéologie de 1979 à 1986, Michel Brézillon fut un des grands serviteurs de la recherche archéologique en France. Mais ces dernières fonctions ne doivent pas faire oublier le scientifique averti ou même le voyageur aventureux des premières années. Pendant toute sa jeunesse, en effet, Michel Brézillon (né à Vincennes) est allé chercher ailleurs l'aventure intellectuelle. Dans l'espace, d'abord, en Indochine, de 1947 à 1950, il découvre les populations semi-nomades Moï (ou Mnong) des Hauts-Plateaux du Sud, appréciant et partageant parfois leur paisible mode de vie juste avant que celui-ci ne soit ravagé par la guerre. De retour en France en 1951, il abandonne bientôt une carrière commerciale pour partir, de 1957 à 1958, au Tassili-n-Ajjer, dans le Sahara algérien, avec la Mission archéologique d'Henri Lhote. Pourtant, l'ailleurs où il finira par s'installer sera celui du temps et, plus particulièrement, celui de la préhistoire : il trouve un autre exotisme à Arcy-sur-Cure, en 1958, où il rencontre André Leroi-Gourhan, l'homme qui comptera le plus dans sa vie et avec lequel il restera en étroite symbiose intellectuelle pendant plus de quinze ans.
L'entente entre les deux hommes est immédiate. En 1962, Leroi-Gourhan le nomme directeur adjoint du Centre de recherches préhistoriques et protohistoriques qu'il vient de créer. Pour Michel Brézillon, les années 1960 sont d'abord celles d'une intense activité de terrain. Aux grandes fouilles paléolithiques d'Arcy-sur-Cure (Yonne) puis de Pincevent (Seine-et-Marne) auxquelles il participe activement s'ajoute la direction de nombreux chantiers de sauvetage. En même temps, il effectue des missions archéologiques hors de France (Nubie, Égypte, Grèce, Algérie, Espagne, Japon). Mais ses deux plus grandes aventures de terrain auront été, sans doute, celles des Mournouards (Marne), en 1960, et de Pincevent, de 1964 à 1970. Par leurs conditions de conservation, les deux sites offraient la possibilité de tester des méthodes novatrices et d'appliquer à la préhistoire l'approche ethnologique préconisée par Leroi-Gourhan. Fouille exemplaire et pionnière que celle de la sépulture collective des Mournouards, dont le but était de montrer qu'avec un bon enregistrement des données et une réflexion menée sur le terrain même le “désordre” apparent des os enchevêtrés révélait une somme considérable d'informations sur “le comportement vivant des hommes du passé”. À Pincevent, l'effervescence scientifique des premières années est indissociablement liée aux échanges dialectiques qu'aimaient entretenir les deux hommes, lors du traditionnel tour de chantier ; mais cette complémentarité intellectuelle s'accompagnait aussi chez Brézillon d'un solide sens de l'organisation dont témoignent les réalisations matérielles de cette époque. C'est lui qui, le premier, mit au point la technique de moulage d'un sol préhistorique dans son intégralité : pour conserver l'image de l'extraordinaire spectacle livré par le décapage d'une habitation de chasseurs de rennes datant de 12 000 ans, il propose d'en prendre l'empreinte au latex, en adaptant la technique qu'il avait utilisée sur les gravures pariétales du Tassili.
En 1966, Michel Brézillon soutient une thèse de doctorat en préhistoire intitulée La Dénomination des objets de pierre taillée. Matériaux pour un vocabulaire des préhistoriens de langue française, qui devient très vite un best-seller, quatre fois réédité, dans le petit monde des préhistoriens. Le Dictionnaire de la préhistoire (1969) consacre sa notoriété. Maître-assistant à la Sorbonne en 1966, puis, de 1969 à 1975, chargé d'enseignement de préhistoire à Paris-I, il devient docteur d'État en 1973.[...]
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Écrit par
- Michèle JULIEN : directeur de recherche au C.N.R.S., directeur du laboratoire d'ethnologie préhistorique du C.N.R.S., U.R.A. 275
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