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GRESSET MICHEL (1936-2005)

Comme le grand traducteur Maurice-Edgar Coindreau, Michel Gresset fut un infatigable passeur de la littérature nord-américaine du xxe siècle. Né à Versailles le 18 novembre 1936, reçu premier à l'agrégation d'anglais en 1959, il est d'abord tenté par un poste de traducteur à l'O.N.U., mais finit par choisir une carrière universitaire. Dans les années 1960, il entreprend sous la direction de Maurice Le Breton une thèse d'État sur l'œuvre de William Faulkner, découvre à cette occasion toute la littérature du Sud et commence à prendre goût à la traduction littéraire.

La passion de la traduction ne le quittera jamais et il ne cessera de réfléchir à ses exigences et à ses finalités. Son œuvre de traducteur est considérable. Pour l'impeccable premier volume des Œuvres romanesques de Faulkner, paru dans la Bibliothèque de la Pléiade en 1977, il revoit non seulement les traductions de Sartoris, Le Bruit et la fureur, Sanctuaire et Tandis que j'agonise, mais traduit entièrement les premières versions de Sartoris et de Sanctuaire. À cela s'ajoutent au fil des années, toujours fidèles et élégantes, les traductions de nombre de nouvelles, d'essais et d'autres textes de Faulkner encore inédits en France, et surtout la nouvelle version, admirable de rigueur et de verve, du Hameau, entreprise en collaboration avec Didier Coupaye pour le troisième volume des Œuvres romanesques (2000). C'est également par les traductions de Michel Gresset que le public français peut découvrir d'autres grands conteurs du sud des États-Unis comme Eudora Welty, Flannery O'Connor, Shelby Foote, Reynolds Price, Fred Chappell et Heather Ross Miller.

Son amour de la traduction, Michel Gresset eut à cœur de le transmettre. En 1981, il crée le prix Maurice-Edgar Coindreau, qui récompense chaque année le meilleur livre américain en traduction, et il est un des membres fondateurs de l'association Atlas qui organise chaque année les assises de la traduction littéraire en Arles. Mais autant que traducteur, Michel Gresset était critique. Il s'était fait connaître dès les années 1960 par ses subtiles chroniques de littérature américaine au Mercure de France et à la Nouvelle Revue française et collabora jusque dans les années 1990 à de nombreuses revues françaises et américaines. Mais on retiendra surtout Faulkner ou la fascination : poétique du regard, l'ouvrage tiré de sa thèse publié en 1982. Prolongeant les réflexions de Sartre, de Malraux et de Jean-Jacques Mayoux, Gresset s'y attache à comprendre l'incomparable singularité d'un prodigieux écrivain, et il est l'un des premiers à scruter son œuvre avec toutes les ressources de la critique moderne, de la phénoménologie à la psychanalyse, de Merleau-Ponty à Lacan. Comme pour la traduction, tout commence chez lui par une lecture attentive des textes. Son intime connaissance des manuscrits de Faulkner lui permet de suivre la genèse de cette écriture foisonnante dans ce qu'elle avait de quasi organique.

Les études faulknériennes doivent beaucoup à Michel Gresset. Les critiques faulknériens aussi. En mai 1980, alors qu'il enseignait à l'Institut Charles-V de l'université de Paris-VII, il organise le premier colloque international consacré au romancier. Il récidive dès 1982, et dans les années qui suivirent, d'autres colloques réunissent des chercheurs européens, américains et parfois asiatiques à Salamanque, Bonn, Rome, Vienne et Venise. Personne plus que lui n'a contribué au rayonnement de ce que l'on appelle parfois, outre-Atlantique, « l'école faulknérienne française ».

— André BLEIKASTEN

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