SEDAINE MICHEL JEAN (1719-1797)
Aîné d'une famille de sept enfants, Sedaine ne compte parmi ses ascendants que travailleurs, maîtres maçons, menuisiers ou serruriers. Son père, entrepreneur des Bâtiments du roi, se ruine et meurt de chagrin, le laissant chef de famille. Pour vivre, il se fait maçon ; Diderot nous dit que son ami « a gâché le plâtre et coupé la pierre trente-cinq ans de sa vie » et Sedaine lui-même se présente à ses contemporains comme « maçon poète ». Car il a le goût des lettres. Il publie des pièces poétiques d'un caractère franc et enjoué, comme l'Épître à mon habit, mais sa vocation le porte vers le théâtre : de 1756 à 1761, il écrit une suite de comédies à ariettes, Le Diable à quatre, Blaise et le savetier, etc., qui font de lui le roi, presque le créateur de l'opéra-comique. Il collabore avec des musiciens connus, Philidor, Monsigny, Grétry. En 1764, il donne Rose et Colas, paysannerie chère au xviiie siècle, pleine de fraîcheur et de conventions, qui était sa pièce préférée.
Puis il aborde la scène officielle de la Comédie-Française pour laquelle il écrit deux pièces : Le Philosophe sans le savoir (1765), drame bourgeois dans le genre sérieux, et La Gageure imprévue (1768), sorte de marivaudage. Le Philosophe sans le savoir est né d'une idée : réhabiliter le nom de philosophe bafoué par Palissot (comédie des Philosophes, 1760). C'est l'exemple même du drame bourgeois tel que le rêvait Diderot, s'opposant point par point à la tragédie. On y trouve une peinture des conditions de vie dans un milieu moyen, et une prédication morale, qui en fait une sorte de manifeste théâtral des philosophes. Le succès de Sedaine continue à l'Opéra-Comique. Le Déserteur (1769) est la plus caractéristique de ses productions de cette époque, opéra-comique larmoyant aux situations tour à tour poignantes et comiques ; c'est un succès durable, qui fournit toute une génération de sujets d'estampes et de pendules. Le succès de Richard Cœur de Lion (1784) ouvre à Sedaine les portes de l'Académie française (1786). Il n'aurait guère pu prévoir alors que l'air « Ô Richard, ô mon roi, l'Univers t'abandonne... » deviendrait bientôt l'un des chants de ralliement des royalistes contre-révolutionnaires. Mais la Révolution le ruine et le prive du titre d'académicien. Il meurt infirme et pauvre, mais entouré de sa famille, ayant été le modèle des époux et des pères.
Cet homme bon, foncièrement honnête, eut un grand nombre d'amis parmi les gens de lettres et les artistes. Les lacunes de sa première éducation lui ont permis d'être un écrivain original et novateur.
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Écrit par
- Denise BRAHIMI : ancienne élève de l'École normale supérieure de Sèvres, professeure agrégée des Universités (littérature comparée), université de Paris-VII-Denis-Diderot
Classification
Autres références
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DRAME - Drame bourgeois
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