MICROSCOPIE
Microscopies de champ proche
Les années 1980 ont vu la naissance et le développement de la microscopie de champ proche, encore appelée microscopie à sonde locale, avec, notamment, les succès du microscope à effet tunnel et du microscope à force atomique. Avec ces nouveaux instruments, l'objet est analysé point par point par balayage d'une sonde locale, une pointe très effilée, placée à quelques distances atomiques de sa surface. L'image obtenue est une cartographie d'une grandeur physique caractéristique de l'objet sondé. Ces nouveaux microscopes sont caractérisés par l'absence d'une optique de transmission ; ils échappent donc aux limitations inhérentes à ces composants optiques.
En configuration de champ proche, l'amplitude de la grandeur physique détectée décroît fortement quand la sonde s'éloigne de l'échantillon. Cela assure un excellent pouvoir de résolution à ce type de microscopie. En particulier, cela permet d'échapper au critère de Rayleigh, lié, lui, à la propagation, et de percevoir des détails de dimension bien inférieure à la longueur d'onde du rayonnement utilisé. L'image possède donc une très haute résolution, car la détection s'effectue très près du lieu d'émission, et c'est la taille utile de la sonde locale qui fixe la résolution. L'image peut ainsi révéler, selon l'interaction choisie, soit une topographie de la surface, soit une cartographie électronique, chimique, magnétique ou optique.
Microscopie par effet tunnel
C'est la réalisation, en 1982, d'une expérience, prévue dès la fin des années 1920 comme la conséquence de la mécanique quantique, qui est à l'origine du développement de ces nouvelles microscopies. Gerd Binnig et Heinrich Rohrer, deux chercheurs des laboratoires I.B.M. Zürich, observent une manifestation directe de l'effet tunnel : un courant d'électrons entre deux électrodes métalliques séparées de quelques nanomètres dans le vide. Ils mesurent la dépendance exponentielle du courant en fonction de la distance qui sépare les électrodes.
Un microscope à balayage (le microscope à effet tunnel) sera développé à la suite de ce succès. Son principe est fondé sur le contrôle d'un courant qui s'établit entre une fine pointe métallique (sonde locale) et la surface d'un échantillon (située à quelques distances atomiques) grâce à l'effet tunnel. C'est le démarrage d'une microscopie nouvelle pour l'étude de matériaux conducteurs ou semi-conducteurs. Son essor a été grandement facilité par les connaissances déjà acquises en physique des surfaces. En quelques années, ces nouvelles microscopies conduisent à une vision nouvelle des surfaces, dans l'espace réel, à l'échelle atomique, qui répond ainsi à la quête des physiciens, métallurgistes et chimistes, et suscite l'intérêt des biologistes. L'intense activité autour de cette nouvelle instrumentation est aussi liée aux applications possibles dans le domaine des nanotechnologies. Les inventeurs de cette nouvelle microscopie, G. Binnig et H. Rohrer, ont reçu en 1986 le prix Nobel de physique.
Principe, réalisation et fonctionnement du microscope
L' effet tunnel est une conséquence de la dualité onde-corpuscule. Il se manifeste lorsqu'une particule doit traverser une région de l'espace, appelée barrière de potentiel, où son énergie totale est inférieure à son énergie potentielle. La traversée par effet tunnel de cette région, interdite au sens de la mécanique classique, est possible si la fonction d'onde associée à la particule s'étend sur des dimensions comparables à celles de la barrière à franchir.
Dans le cas du microscope fondé sur ce principe, la barrière est l'espace vide (de quelques dixièmes de nanomètre) qui existe entre l'échantillon[...]
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Écrit par
- Christian COLLIEX : directeur de recherche au C.N.R.S., responsable du groupe microscopie électronique, analytique et quantitative du laboratoire de physique des solides, Orsay
- Jean DAVOUST : directeur de recherche deuxième classe au C.N.R.S., responsable de l'équipe transport membranaire et fonctions lymphocytaires
- Étienne DELAIN : directeur de recherche au C.N.R.S., responsable du laboratoire de microscopie cellulaire et moléculaire de l'Institut Gustave-Roussy, Villejuif
- Pierre FLEURY : directeur honoraire de l'Institut d'optique théorique et appliquée de Paris, professeur honoraire au Conservatoire national des arts et métiers
- Georges NOMARSKI : directeur de recherche au C.N.R.S., Institut d'optique d'Orsay, professeur à l'Institut d'optique, responsable du laboratoire de microscopie, université de Paris-XI, Orsay.
- Frank SALVAN : professeur à la faculté des sciences de Luminy, université d'Aix-Marseille, directeur du laboratoire de physique des états condensés
- Jean-Paul THIÉRY : maître de recherche au C.N.R.S.
Classification
Médias
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