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HORSZOWSKI MIECZYSLAW (1892-1993)

Figure légendaire du piano, Horszowski a traversé le xxe siècle en continuant à jouer jusqu'à l'âge de quatre-vingt-dix-neuf ans, après quatre-vingt-dix ans de carrière !

Il naît à Lemberg, l'actuelle Lvív (Ukraine), alors en territoire autrichien, le 23 juin 1892. Il commence ses études avec sa mère, une élève de Karl Mikuli, le disciple de Chopin, puis les poursuit au conservatoire de sa ville natale avec Henryk Melcer et Mieczysłav Soltys. Il se fixe ensuite à Vienne, où il travaille, à partir de 1899, avec Theodor Leschetizky, qui est aussi le maître d'Artur Schnabel, Ignaz Friedman et Ignaz Paderewski. Il donne son premier concert à Vienne en 1900 et joue, en 1902, le Premier Concerto de Beethoven à Varsovie. Il commence une carrière d'enfant prodige qui le mène dans toute l'Europe et, dès 1903, en Amérique du Sud. Il joue devant le pape Pie X et fait ses débuts à New York en 1906. En 1911, il cesse de courir le monde entier et se fixe à Paris, où il entreprend des études universitaires à la Sorbonne. Au début de la Seconde Guerre mondiale, il s'installe aux États-Unis, commence à enseigner au Curtis Institute of Music de Philadelphie en 1942 et acquiert la nationalité américaine en 1948. Parmi ses élèves, on compte notamment Murray Perahia et Peter Serkin. Sa carrière s'ouvre à la musique de chambre : Pablo Casals (avec lequel il avait joué pour la première fois en 1910) et Joseph Szigeti en font l'un de leur partenaire privilégié. En 1947, il participe à la fondation du New York Piano Quartet avec Alexander Schneider, Milton Katims et Frank Miller. À partir de 1950, Schneider et Casals l'entraînent dans l'aventure du festival de Prades, dont il est l'un des piliers. Il joue également avec Jacques Thibaud ou Rudolf Serkin, et devient l'assistant de ce dernier au festival de Marlboro avant d'y enseigner lui-même. Parallèlement, il entreprend de donner quelques grands cycles de concerts, notamment l'intégrale de la musique pour piano de Beethoven répartie sur une saison (douze concerts), l'intégrale des sonates pour piano de Mozart en quatre concerts ou celle du Clavier bien tempéré de Bach. Après une longue période d'absence (aucun récital à Paris entre 1927 et 1964), il revient régulièrement sur les scènes européennes à partir des années 1970 ; le public semble alors le redécouvrir. Il promet de venir fêter son centenaire à Paris, mais sa santé l'en empêche. Après un dernier concert à Philadelphie, le 31 octobre 1991, il meurt dans cette ville, le 22 mai 1993.

Doté d'une mémoire phénoménale, il jouait toujours par cœur — même la musique de chambre —, ce qui lui permit de continuer à travailler lorsqu'il commença à perdre la vue, vers l'âge de quatre-vingt-dix ans. Véritable mémoire vivante du clavier, il avait perpétué la tradition d'Europe centrale depuis Czerny et Chopin avec un rare sens du toucher et de la couleur. Il représentait à ce titre une synthèse entre les deux principales filiations pianistiques du xixe siècle. Loin d'accepter la rigueur excessive des conceptions modernes et l'omniprésence de la virtuosité, il avait conservé cette liberté du discours fondée avant tout sur le chant. Son jeu était fait de simplicité et, à l'image de l'homme, ne cherchait pas à plaire. Artur Schnabel, qui était l'un de ses plus fervents admirateurs, soulignait son « intégrité musicale ». Jusqu'à un âge avancé, il avait également défendu la musique de son temps, jouant ou créant des œuvres de Villa-Lobos, Martinů, Copland, Dallapiccola et Szymanowski.

— Alain PÂRIS

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Écrit par

  • : chef d'orchestre, musicologue, producteur à Radio-France

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