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MIFUNE TOSHIRŌ (1920-1997)

« Je ne connaissais rien au métier d'acteur », « cela arriva sans que je puisse réagir »... Mifune Toshirō répétait souvent ces paroles. C'était la vérité, toute pure, toute simple. La carrière de l'acteur japonais le plus célèbre au monde, qui avait accolé son nom à quelque 135 films, qui avait été, dix-sept années durant, le compagnon cinématographique de Kurosawa Akira, avec lequel il avait tourné quinze fois – quinze chefs-d'œuvre – et grâce auquel il avait obtenu à deux reprises – fait rarissime – le prix d'interprétation au festival de Venise (pour Yōjimbo, en 1961, puis pour Barberousse, en 1965), aura été l'exact fruit du hasard et de la nécessité.

Rashomon, A. Kurosawa - crédits : Hulton Archive/ Moviepix/ Getty Images

Rashomon, A. Kurosawa

Né le 1er avril 1920, à Jingdao, de parents japonais installés en Chine, Mifune Toshirō grandit et fait ses études en Mandchourie. Il est quelque temps photographe à Shanghai, puis passe cinq ans dans l'armée japonaise. Après la guerre viennent le désœuvrement et la nécessité de trouver un travail. Envisageant de devenir opérateur de cinéma, Mifune se présente, en 1946, à la Tōhō, les plus importants studios japonais de l'époque. Ses qualités de technicien ne retiennent pas l'attention mais la firme est en quête de nouveaux visages. À l'issue d'un casting, Mifune Toshirō est engagé pour L'Âge de la nouvelle folie (1946), un film de Yamamoto Kajiro. Un an plus tard, il tient un rôle important dans Au-delà des sommets argentés. Réalisé, sans grand génie, par Taniguchi, le film a été écrit par un jeune cinéaste qui, malgré sept œuvres à son actif, est encore peu connu : Kurosawa Akira. Rarement impressionné par les acteurs, Kurosawa s'avoue immédiatement subjugué par la personnalité et le style très neuf de Mifune. « C'était par-dessus tout la rapidité de son jeu qui était surprenante. Il lançait tout d'une manière très directe et expéditive » (Kurosawa Akira, Comme une autobiographie, 1985. Ensemble, le cinéaste et l'acteur vont conquérir leurs lettres de noblesse. Tour à tour gangster tuberculeux (L'Ange ivre, 1948), médecin (Le Duel silencieux, 1949), policier à qui l'on a volé son arme (Un chien enragé, 1949), peintre fameux en butte aux paparazzi (Scandale, 1950), Mifune affine et affirme un talent qui va éclater à la face du monde occidental en septembre 1951 avec la présentation de Rashōmon à Venise. Le film obtient le lion d'or et, quelque temps plus tard, l'oscar du meilleur film étranger aux États-Unis. Le cinéma japonais est désormais universellement reconnu, Kurosawa intronisé grand réalisateur et Mifune Toshirō star internationale. La collaboration des deux hommes se poursuit, en parfaite harmonie. Il y aura L'Idiot (1951), Les Sept Samouraïs (1954) – qui haussera un peu plus leur notoriété –, Le Château de l'Araignée et Les Bas-Fonds (1957), La Forteresse cachée (1958), Les salauds dorment en paix (1960), Yōjimbo (Le Garde du corps, 1961), Sanjuro (1962) et Entre le ciel et l'enfer (1963). Barberousse (1965), met un point final à leur entente. Entre-temps, l'acteur a tourné avec des cinéastes de moindre envergure, apparaissant, tout de même, dans La Vie de Oharu, femme galante (1952) de Mizoguchi. Il a fondé, également, sa propre maison de production, « Mifune Pro », en 1962, et assuré la réalisation de L'Héritage des cinquante mille (1963). Il vole désormais de ses propres ailes et rejoint volontiers l'Occident, pour le meilleur (Duel dans le Pacifique, de John Boorman, en 1968) comme pour le pire (Soleil rouge de Terence Young, en 1971). On le voit également, dans 1941 de Steven Spielberg (1980) ou, à la télévision, dans la série Shōgun.

— Colette MILON

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Rashomon, A. Kurosawa - crédits : Hulton Archive/ Moviepix/ Getty Images

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