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MIGRATIONS ANIMALES

Importance écologique des migrations

Les migrations ont de nombreuses implications écologiques et permettent l'utilisation optimale des ressources de certains habitats, qui sans l'existence de populations fluctuantes demeureraient inexploitées. Leur cycle est étroitement adapté à celui des écosystèmes présentant d'amples fluctuations de la productivité. Les populations migratrices mettent à profit les « pics », puis évacuent l'habitat quand la biomasse consommable diminue. Au sein d'une même communauté, elles ne concernent que les animaux se trouvant aux niveaux trophiques sujets à des fluctuations importantes.

Ces constatations s'appliquent à la zone de reproduction et aussi aux quartiers d'hiver. Les populations migratrices profitent d'une capacité limite d'un niveau supérieur au moment où elles séjournent dans une région déterminée, par suite d'une productivité saisonnière plus élevée ; puis elles la quittent quand la biomasse consommable régresse et que s'installe une période de disette, pouvant aller jusqu'à la disparition totale de la nourriture convenant à un type donné d'animal dans une région déterminée.

Les corrélations entre la productivité et les déplacements migratoires sont particulièrement apparentes dans le cas des oiseaux migrant des régions arctiques aux savanes tropicales. Dans l'Arctique, la productivité végétale et animale est très élevée pendant une courte période estivale ; canards et limicoles en profitent pour nicher. À l'arrivée de l'hiver, précoce aux hautes latitudes, les oiseaux migrent vers le sud et vont hiverner dans les savanes africaines, du Sénégal au Soudan. Les pluies estivales y ont créé des conditions très favorables aux oiseaux aquatiques qui s'y réfugient en troupes nombreuses, se déplaçant en fonction des modifications écologiques entraînées par le retrait des eaux. Ces migrateurs repartent au printemps quand la sécheresse a rendu l'habitat défavorable ; mais leur aire de reproduction ne tardera pas à s'ouvrir à nouveau à eux. Des constatations analogues s'appliquent aux autres migrateurs, dont le cycle de déplacement suit presque toujours exactement celui des variations de la quantité de nourriture disponible.

Des populations fluctuantes exploitent ainsi les ressources de plusieurs habitats très différents à des époques décalées dans le cycle annuel, mais les unes comme les autres sont caractérisées par la biomasse consommable la plus élevée. Cet ajustement se fait avec la plus grande précision dans la chronologie des déplacements. La disponibilité et l'accessibilité de la nourriture interviennent au même titre que sa quantité en valeur absolue.

En outre, la dispersion d'une population donnée sur de vastes étendues au cours de son cycle annuel permet l'exploitation de ressources qui seraient autrement hors de portée. C'est ainsi que, au moment de la reproduction, les poissons vivent dans des eaux ayant des caractéristiques physiques (et biotiques) très précises ; ils peuvent s'en évader en dehors de la période de reproduction pour se tenir dans des eaux ayant des conditions océanographiques différentes, mais des ressources alimentaires importantes. Cela est encore plus apparent dans le cas des oiseaux de mer. À l'époque de la reproduction, les oiseaux pélagiques sont obligatoirement confinés à certains secteurs des océans en raison de la nécessité d'établir leurs nids sur des terres. Ils ne peuvent donc exploiter que les ressources d'une aire limitée, d'un rayon compatible avec leurs performances de voiliers. Mais, en dehors de la période de reproduction, leur dispersion à grande échelle, sans attache à un point quelconque, leur ouvre des zones riches en aliments qui autrement seraient inexploités.

Ces adaptations écologiques précises[...]

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Écrit par

  • : docteur en sciences de l'environnement, historienne des sciences et de l'environnement, chercheuse associée au laboratoire SPHERE, CNRS, UMR 7219, université de Paris-VII-Denis-Diderot
  • : membre de l'Académie des sciences, directeur honoraire du Muséum national d'histoire naturelle

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Médias

Invasion de criquets migrateurs en Afrique du Sud - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Invasion de criquets migrateurs en Afrique du Sud

Monarque - crédits : James L. Amos/ Corbis Documentary/ Getty Images

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Saumons - crédits : Johnny Johnson/ The Image Bank/ Getty Images

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