FÜST MILÁN (1888-1967)
Les recoins de l'inconscient
Quant à ses récits, leurs protagonistes monstrueux, dévorés d'obsessions, représentent des cas limites de la vie humaine, et leur monde exhale une atmosphère d'angoisse. Les Rieurs (Nevetők, 1918) tracent l'évolution psychologique d'un assoiffé de l'inattendu, ancien condisciple et mauvais génie du narrateur dont il est difficile de savoir s'il est héros d'un amour-passion ou victime de son imagination effrénée. Dans Avent (Ádvent, 1920), l'auteur confronte un catholique clandestin avec un juge de tribunal dans le Londres du xviie siècle, à l'heure des persécutions religieuses : la crise de conscience de l'homme abrité derrière son masque met en évidence à la fois les mécanismes de la terreur et les recoins obscurs de l'inconscient.
Le prétexte de relater des souvenirs à la première personne permet à Füst de prendre ses distances par rapport à ses sujets, procédé dont il donne la véritable mesure dans le chef-d'œuvre qu'est l'Histoire de ma femme (A feleségem története, 1942). En analysant sa jalousie pour sa femme frivole dont le portrait prend de plus en plus d'ampleur, et à force de laisser osciller son jugement entre ses anciens soupçons et ses incertitudes présentes, perdu dans le labyrinthe des images de l'être et du paraître, le capitaine Störr, marin de type rabelaisien, parvient à imposer au lecteur un sens particulier de la temporalité.
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Écrit par
- Gyorgy RABA : agrégé de lettres, écrivain
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