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KABELÁČ MILOSLAV (1908-1979)

Le compositeur et chef d'orchestre tchèque Miloslav Kabeláč naît à Prague le 1er août 1908. Au conservatoire de sa ville natale, il étudie la composition avec Karel Boleslav Jirák et la direction d'orchestre avec Pavel Dědecěk (1928-1931), puis le piano (1931-1934), avec Vilém Kurtz, un des maîtres de Rudolf Firkušný. Il débute dans la vie active en 1932, comme régisseur musical et chef d'orchestre à la Radio tchèque de Prague, postes qu'il occupera jusqu'en 1941, puis de 1945 à 1954. Il est professeur de composition au Conservatoire de Prague de 1958 à 1962.

Le catalogue de Kabeláč comporte une soixantaine d'ouvrages, dont huit symphonies, composées entre 1941 et 1970, qui en font l'un des grands symphonistes du xxe siècle. Chacune de ces symphonies emploie une formation différente tout en abordant des problèmes d'ordre expressif ou structurel toujours renouvelés. La Première Symphonie, op. 11 (1941-1942), pour cordes et instruments à percussions, est déjà remarquable par son univers sonore accordant aux percussions une place des plus insolites pour l'époque. Et les suivantes ne lui cèdent en rien, en particulier la Troisième Symphonie, op. 33 (1948-1957), pour orgue, cuivres et timbales, et la Huitième Symphonie, dite « Antiphonies », op. 54 (1970), pour soprano, chœur mixte, percussions et orgue.

Kabeláč est un grand rythmicien doublé d'un remarquable coloriste, ses alliages de timbres dénotant une recherche qui n'a d'égale que leur originalité. À ces qualités, il faut ajouter un sens épique de la fresque, bien rare chez ses contemporains, allié à une inspiration dramatique puissante, et un souffle ample, souvent pathétique, dont la grandeur préfère l'austérité aux débauches sonores luxuriantes. De fait, Kabeláč travaille son matériau en brefs motifs typés donnant lieu à des développements impressionnants dans leur gradation.

Si ses deux Fantaisies pour orgue (1957-1958) sont encore tonales, s'inscrivant dans la tradition postromantique d'un Liszt ou d'un Reger, les Quatre Préludes pour orgue (1963) témoignent d'une écriture des plus modernes par leur emploi de clusters et d'agrégats harmoniques qui rappellent la manière d'un Ligeti. L'œuvre qui va faire connaître Kabeláč en Europe occidentale est Huit Inventions pour percussions, op. 45 (1962-1963), dédiée aux Percussions de Strasbourg, qui la créent le 2 avril 1965 sous forme d'un ballet. On trouve dans cette page la principale caractéristique de ce compositeur – qui fut l'un des rares à s'approprier presque toutes les techniques de l'avant-garde sans que celles-ci ne se délitent en un simple catalogue d'effets –, à savoir la synthèse entre des racines éloignées (le chant grégorien, Giovanni Gabrieli, Bach) et des influences modernes, au premier rang desquelles l'infrachromatisme d'un Alois Hába et le sérialisme d'un Schönberg, tout particulièrement de celui des Variations pour orchestre, op. 31. Kabeláč fait ainsi feu de tout bois, mélangeant aléatoire et structuralisme dodécaphonique, contrepoint libre et contrepoint canonique, tension modale et tension sérielle, créant sans complexe un continuum sonore auquel il superpose des ostinatos post-stravinskiens, usant de hauteurs déterminées ou de hauteurs relatives (n'hésitant jamais à faire se côtoyer les deux). Rien d'étonnant à ce que l'on retrouve chez lui une écriture strictement notée en même temps qu'un langage « libre » quant à son déploiement temporel.

Citons encore, parmi ses chefs-d'œuvre, Hamlet-Improvisation, pour grand orchestre, op. 46 (1962-1963), Reflets, op. 49, cycle de neuf miniatures pour orchestre de chambre (1963-1964), Eufemias Mysterion, op. 50 (1964-1965), pour soprano et vingt-quatre instrumentistes.

Qu'il sérialise[...]

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Écrit par

  • : compositeur, critique, musicologue, producteur de radio

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