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MILOSZ OSCAR VLADISLAS DE LUBICZ- (1877-1939)

Le surgissement à notre époque de ce poète lituanien de langue française, qui fait songer à la fois à Nerval, à Verlaine et à Claudel, ressemble à celui d'une comète : venu d'ailleurs, vivant à l'écart du monde et des modes littéraires, on dirait un romantique égaré entre la fin du symbolisme et les débuts du surréalisme. Nourri de Dante, de Goethe, de Byron et de Poe, féru d'illuminisme, d'alchimie, de Kabbale, ses vrais héros sont Faust et Salomon ; cette constellation de noms suffit à le placer hors du temps, surtout hors de notre temps. Mais sa démarche, dont l'unité réside dans le « pèlerinage aux sources », lui permet d'être un contemporain de toutes les époques : il a cherché passionnément, à travers tous les livres des sages qui passent pour fous, à travers tous les mythes comme à travers tous les langages, le secret de la souffrance et de la noblesse de l'homme ; il a même rêvé d'être un nouvel Adam.

Sous le signe de l'exil

Oscar Vladislas naît à Czereïa, dans l'actuelle Biélorussie, où les Lubicz-Milosz possèdent trente mille hectares de terres. La forme polonaise de leur nom ne doit pas faire illusion : on est en territoire russe, mais, si les paysans utilisent la langue balte, la gouvernante est française, et à la maison on parle aussi bien l'anglais que l'allemand ; l'enfant n'a même pas de langue maternelle. Sa grand-mère était une cantatrice italienne, sa mère est fille d'un rabbin de Varsovie : pour être noble, il n'est pas de « race pure ». Il choisira de n'écrire qu'en français – signant O. V. de L. Milosz – et s'enracinera dans une Lituanie plus ou moins mythique.

En 1889, Milosz s'installe à Paris, qui restera son port d'attache (il est naturalisé français en 1931) : ce cosmopolite fait de fréquents voyages à travers l'Europe ; sans cesse en quête d'ailleurs, il déménage continuellement, avant de finir ses jours à Fontainebleau, le 2 mars 1939.

Au sortir du lycée Janson-de-Sailly, il apprend l'hébreu et s'intéresse à l'épigraphie sémitique, mais, très vite, la littérature, puis la seule Bible, constituent le véritable lieu de son séjour.

Entre vingt et trente ans, il publie deux recueils de poésie, Le Poème des décadences (1899) et Les Sept Solitudes (1906), qui obtiennent quelques échos dans les milieux attachés au symbolisme. Ses maîtres mots sont « jadis » et « très loin » ; les femmes qui le hantent, Salomé ou les héroïnes de Poe ; un ton volontiers baudelairien, mais tout en mineur, une versification mélodieuse, des thèmes décadents l'amènent à quelques réussites – dont les anthologies lui font mérite à tort, car son vrai génie est ailleurs –, ainsi : Le Vieux Jour, La Reine Karomama, Les Morts de Lofoten.

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Écrit par

  • : professeur de littérature française moderne et contemporaine à l'université de Paris-VIII-Saint-Denis

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  • LITUANIE

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    ...l'indépendance en 1918, les mouvements d'avant-garde de l'étranger influencèrent les lettres lituaniennes qui les assumèrent sans infléchir pour cela le génie national. Jusqu'à nos jours, la veine lyrique garde la primauté, ainsi qu'en témoigne le poète lituanien d'expression française OscarMilosz.