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CANIFF MILTON (1907-1988)

Mort d'un cancer le 3 avril 1988, Milton Arthur Paul Caniff est né dans l'Ohio. Il travaille dès l'âge de huit ans, et sera notamment figurant de cinéma, puis acteur au théâtre, au point d'hésiter un moment entre ces deux carrières. C'est chez les scouts qu'il commence à dessiner. Ses premiers dessins paraissent dans des journaux de collège, puis universitaires. Il entre ensuite au Dayton Journal (1925) et collabore à divers quotidiens régionaux. Caniff est un bourreau de travail et, quand il aura trouvé son rythme, il saura le conserver jusqu'à sa mort.

Après avoir été engagé au Columbus Dispatch (1925-1930), qui le licencie lors de la crise, Caniff vient tenter sa chance à New York. Il est retoucheur de photos à l'Associated Press, travail alimentaire qui lui permet d'être assistant-dessinateur, puis de publier ses premières séries de dessins et ses premières bandes dessinées : The Gay Thirties (dessins) et Puffy the Pig (brefs textes illustrés) paraissent à partir de 1932, mais aussi Dickie Dare (1932-1935), inspiré de Robin des Bois. Le voilà lancé.

Milton Caniff fait alors une rencontre déterminante, celle de Noel Sickles, innovateur et expérimentateur de génie, avec qui il monte un studio graphique. Les trouvailles de Sickles, Caniff va les utiliser, les systématiser, leur donner l'envergure qu'elles méritent. Son style si particulier, souple, élégant, minutieux, sensuel, dû à l'utilisation combinée du pinceau et de la plume – ce qu'on appellera le style Caniff – est né. Le 19 octobre 1934, dans deux journaux, le New York Daily News et le Chicago Sun, commence l'une des plus fameuses bandes dessinées de l'histoire : Terry et les pirates. Le jeune Terry, son ami Pat Ryan (vaguement inspiré de Charlton Heston), la belle Burma (inspirée de Joan Crawford), le faire-valoir « jaune » G. W. Confucius, puis Dragon Lady, inspirée de Marlene Dietrich, et qui deviendra l'archétype de la femme fatale, de la « belle méchante », s'avéreront autant de personnages inoubliables. Le succès est d'ailleurs considérable et immédiat. Pourtant, la guerre terminée, Caniff arrête cette série poursuivie douze années durant. Lui succède Steve Canyon, histoire d'un aviateur, intéressante mais moins magique. Caniff est entré dans la tradition. Jusqu'à sa mort, et pendant quarante et un ans, il continuera la série, se contentant, les dernières années, d'encrer les esquisses de ses collaborateurs. Ajoutons que le changement de série était dû uniquement au fait que Caniff maîtrisait les droits de son dernier personnage, pas ceux de Terry. Influencé par le cinéma (qui lui doit aussi beaucoup), Caniff a appris la narration dans Naissance d'une nation. Quatre cases par semaine, une planche le dimanche, deux récits qui s'imbriquent selon une formule rodée, la performance fait rêver. Adoré des militaires, décoré, chéri par les autorités, auteur de manuels militaires, Caniff avait été réformé ! Mais, toujours pendant la guerre, il créa la légendaire série Male Cali (1943-1946), où sa sensualité fit merveille. On peut dire de lui qu'il a inventé une autre femme dans la bande dessinée. « Ce sont des féministes dans l'âme », dit Pratt des héroïnes de Caniff, « alors que lui-même ne l'était pas ». Caniff, maître du clair-obscur, de l'équilibre des masses noire et blanche, du détail minutieux (il lui est arrivé de lire trente-sept ouvrages pour réaliser une seule séquence), était capable, avec un seul dessin, de faire sentir les lieux, les heures de la journée, l'humidité, la chaleur, les odeurs, la saison. Ses personnages étaient d'une vérité telle que, lorsqu'il fit assassiner une héroïne secondaire, des universités se mirent en deuil, des télégrammes de condoléances et des couronnes mortuaires arrivèrent au journal, sans compter les lettres[...]

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