MIME ET PANTOMIME
Les temps modernes
Wague, jouant d'instinct et d'inspiration, s'oppose systématiquement à Séverin et à Thalès, représentants de la pantomime d'école. Après quelques années de recherches, il abandonne la pantomime blanche et les pierrots qu'il incarne avec Christiane Mendélys, la dernière des colombines, pour en revenir au mimodrame, plus accessible aux spectateurs. Interprète de la pantomime dramatique, Georges Wague a pour partenaires Colette, qui l'a dépeint jusqu'à le rendre inoubliable, Caroline Otéro, Christine Kerf, Régina Badet, Sonia Pavloff, Polaire, Napierkowska, qui toutes ont fait leur carrière au théâtre ou au music-hall et non dans l'art muet. Wague, mime, sera l'interprète principal du premier film muet de long métrage, Christophe Colomb, tourné pendant la Première Guerre mondiale. Nommé professeur au conservatoire de musique, Wague continuera à l'Opéra sa carrière de mime aux côtés d'Ida Rubinstein (La Tragédie de Salomé, Antoine et Cléopâtre, musique de Florent Schmitt), Natacha Trouhanova (La Danse macabre de Saint-Saëns), Argentina (L'Amour sorcier de Manuel de Falla, Triana d'Isaac Albéniz). La pantomime blanche n'a plus pour représentants que Séverin, un vétéran, et Farina, un jeune.
Cependant, entre les deux guerres mondiales, Étienne Decroux réhabilite par la parodie les sources émotionnelles de la pantomime antique et professe, dans l'école qu'il ouvre, la technique du « mime corporel ». Par les mouvements du corps, il suggère la machine, la marche, une course à bicyclette ou les sentiments collectifs de citadins animés par la joie ou hantés par la peur. Marcel Marceau, le plus doué de ses élèves, se libère de la servitude trop apparente du dynamisme contemporain. Il crée le personnage de Bip, un frère de Pierrot, un bouffon à figure enfarinée vêtu d'un collant noir d'acrobate, et, sans rien devoir aux techniques traditionnelles du mime, invente avec le monomime et ses « pantomimes de style » un langage gestuel qui lui a apporté un renom incontesté. Il a été amené à se produire sur les scènes des pays du monde entier, a suscité partout l'enthousiasme et a fait école. En France, Marceau trouve en Gilles Ségall et ses « pantomimes d'un sou » un continuateur, que Jean-Louis Barrault n'hésite pas à appeler dans sa troupe, et en Pierre Véry un présentateur de ses pantomimes de style, dans une forme statique comparable à ce qu'on appelle les « tableaux vivants ».
Marcel Marceau, qui a tenté plusieurs fois d'organiser des compagnies de mimes interprétant des spectacles collectifs, n'est pas parvenu à obtenir l'homogénéité durable et suffisante, à défaut de salle de théâtre spécialisée, pour persévérer dans la pantomime. C'est dans la parodie et le monomime, avec son personnage de Bip, qu'il a atteint à la maîtrise du geste et de soi (Le Fabricant de masques).
À l'étranger, qu'il n'a cessé de parcourir, à part de courts séjours à Paris, Marcel Marceau a suscité quelques vocations, notamment en Tchécoslovaquie et au Japon. D'autre part, le fils d'Étienne Decroux a repris le flambeau de son père. Dimitri Werner, dit Dimitri, élève de Decroux et de Marceau, Pierre Byland, qui renouvelle la pantomime acrobatique, Jean-Baptiste Thierrée, dit Baptiste, en compagnie de Victoria Chaplin, la fille de Charles Chaplin, essaient avec succès de maintenir la mime dans des traditions toujours peu faciles à retrouver.
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Écrit par
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Médias
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