MISSIONS ARCHÉOLOGIQUES FRANÇAISES À L'ÉTRANGER
Au printemps de 2005 est paru, sous l'égide du ministère des Affaires étrangères, un fort volume établissant en plus de sept cents pages, à travers les contributions, largement illustrées, de quelque deux cent cinquante chercheurs, le bilan de deux décennies de fouilles françaises à l'étranger. Archéologies. Vingt ans de recherches françaises dans le monde (Maisonneuve & Larose-A.D.P.F.-E.R.C., Paris) permet d'aborder le sujet avec toute la profondeur de champ nécessaire.
Organisation de l'archéologie française à l'étranger
La France a la spécificité de s'être dotée, dès 1945, d'une instance d'évaluation et d'orientation de sa politique archéologique en dehors du territoire : la Commission des fouilles. Créée dans une perspective traditionnelle d'échanges entre l'archéologie extra-européenne et la diplomatie française, cet organisme permet une politique suivie, quant au choix des partenaires comme à l'exigence d'une rigueur scientifique. Regroupant les grands acteurs de la recherche nationale (musées, C.N.R.S., universités, Collège de France, École pratique des hautes études, I.N.R.A.P.), la commission soutenait financièrement, en 2005, plus de cent quarante missions réparties dans soixante pays. En 1970, on dénombrait cent opérations analogues, et il y en eut au cours des années 1990 jusqu'à deux cents.
Le passage à l'indépendance de nombreux pays a modifié les conditions d'exercice de l'archéologie sur les territoires nationaux – ce quel que soit l'État fouillant hors de ses frontières. La France est en effet loin d'être la seule à intervenir à l'étranger, mais son action et celle de la Grande-Bretagne, des États-Unis ou de l'Allemagne sont difficiles à comparer, dans la mesure où l'organisation des fouilles à l'étranger peut dépendre de facteurs spécifiques (par exemple une part plus importante du mécénat dans les missions envoyées), et où la centralisation française liée à la Commission des fouilles donne à la présentation des opérations menées dans différents pays une visibilité et une lisibilité dont témoigne l'ouvrage publié en 2005.
En trente ans, l'activité des Français s'est considérablement adaptée, aux demandes locales comme aux nouveaux enjeux de la discipline. L'archéologie à l'étranger est fonction des liens historiques tissés entre les pays, même si de nouveaux acteurs peuvent apparaître – ainsi la Pologne et le Japon en Syrie. Elle participe des relations internationales, se déployant ou se retirant en fonction de conditions politiques. La crise du canal de Suez, en 1956, entraîna ainsi le déplacement de la recherche française vers l'Éthiopie et le Soudan ; la révolution iranienne de 1979, et les conflits qui suivirent, en Iran (où les archéologues français étaient implantés depuis 1884 dans les sites prestigieux de Suse, Tépé Sialk et Tureng Tépé) et en Irak, la conduisirent vers le golfe Persique et la péninsule arabique. C'est la répartition des missions dans tout l'ensemble du Moyen-Orient qui est ainsi modifiée.
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Écrit par
- Nicolas ENGEL : conservateur du Patrimoine au musée Cernuschi, Paris
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