MOAI
Les motifs qui ont donné lieu à l'édification d'une statuaire monumentale dans l'île de Pâques, les moai, sont aussi mal connus que les cérémonies qui se déroulaient dans ces centres culturels et les techniques qui en ont permis la réalisation.
Néanmoins, les travaux successifs de restauration et de redressement des statues effectués par le professeur W. Mulloy de l'université du Wyoming (États-Unis) ont permis d'envisager quelques hypothèses concernant les techniques de sculpture, de transport et d'érection des têtes. D'autre part, les ateliers qui semblent s'être arrêtés en pleine fabrication fournissent les témoignages des stades successifs du travail permettant de retrouver les méthodes et les techniques des anciens Pascuans.
Il semble que les quelque cinq cents moai que l'on a retrouvés viennent pour la majeure partie de la carrière du Rano Raraku, volcan situé au nord-est de l'île. Les têtes étaient sculptées à même la montagne dans le tuf volcanique relativement tendre. Un canal oblong était creusé dans la roche délimitant la masse à partir de laquelle serait obtenue la pièce ; les hommes travaillaient à plusieurs dans ce canal, à l'aide de sortes de pics en pierre taillée non emmanchés, ou toki, outils que l'on retrouve encore par dizaines dans la carrière. La sculpture était taillée en position allongée, perpendiculaire à la pente ; on commençait par la face, puis on sculptait les côtés et, enfin, le dos. Elle n'était alors fixée au rocher que par une arête dorsale, détruite à mesure que le canal était remblayé. On faisait ensuite glisser la sculpture vers le bas de la pente en la retenant par des cordages, une partie de l'arête ayant été conservée pour l'empêcher de dévier. Au pied de la pente, un trou était préparé pour recevoir la base de la sculpture, et la rupture de pente permettait de redresser la statue sans trop d'efforts. Ce processus semble avoir été le plus courant. Dressée au pied du volcan, la sculpture était alors terminée à l'exception des yeux qui n'étaient sculptés qu'une fois la statue mise en place sur un ahu, dernière retouche qui donnait « vie » aux sculptures.
Il fallait environ un an pour exécuter un grand moai avec une trentaine d'hommes pouvant travailler simultanément sur la sculpture. Les cordes de retenue qui servaient également au transport étaient fabriquées à partir de la fibre de l'arbre triumfetta semitriloba.
Les moai devaient ensuite être acheminés à travers l'île vers les différents ahu. Cette opération était difficile, car les moai pèsent de 10 à 82 tonnes, et des explications diverses ont été fournies : système de traînage, déplacement nocturne par magie, entre autres. L'hypothèse de W. Mulloy décrit un dispositif plus complexe : deux traverses convexes de bois étaient fixées sur la face de la sculpture dressée, elles servaient à la fois de traîneau et de coussin. La pièce était renversée, face contre terre. Une solide fourche en bois était posée à cheval sur la sculpture en avant de la tête, la partie fourchue à la hauteur du cou. Une forte corde entourait le cou de la sculpture, passait sur la fourche et était tirée vers l'avant ; la fourche pivotait d'arrière en avant, la tête était soulevée et l'ensemble de la sculpture avançait d'une courte distance par un mouvement de bascule. L'opération était recommencée plusieurs milliers de fois pour transporter la pièce à l'endroit voulu.
Le redressement se passait de la façon suivante : deux leviers glissés sous la sculpture étaient érigés petit à petit par une construction en maçonnerie de plus en plus inclinée pour former un angle de 35 degrés avec la verticale. La sculpture était ensuite mise debout en tirant avec des cordes et en continuant la maçonnerie, qui[...]
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Écrit par
- Marie-Claire BATAILLE : maître de conférences des Universités au Muséum national d'histoire naturelle
Classification
Médias
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