MODÉLISATION DU CLIMAT
Les modèles de climat, élaborés depuis le milieu des années 1950, sont des programmes informatiques exécutés sur des ordinateurs pour produire des simulations numériques de l’évolution de l’état de l’atmosphère. Ces modèles, dits aussi « de circulation générale », sont fondés, d’une part, sur des formes approchées des équations qui régissent la circulation de l’atmosphère au-dessus de la surface du globe – ce que les spécialistes appellent le cœur dynamique du modèle – et, d’autre part, sur des représentations (appelées paramétrisations du modèle), parfois plus empiriques, des autres processus affectant l’atmosphère : absorption de l’énergie provenant du Soleil, nuages, pluie, évapotranspiration des végétaux, etc. Les modèles de circulation générale servent quotidiennement pour prédire la situation météorologique des jours suivants, mais aussi, sur de plus longues échelles de temps, pour simuler une météorologie qui se déroulerait sur plusieurs décennies, siècles, voire millénaires. Les simulations longues sont analysées en termes statistiques (cycle annuel des températures ou des pluies, régimes de temps, événements extrêmes…), cette vision statistique définissant le climat par rapport à la météorologie.
Les simulations numériques permettent à la fois de comprendre les mécanismes du climat et d’anticiper ses changements futurs. Les modèles qui les produisent, rebaptisés « modèles de climat » puis « modèles du système Terre » (car intégrant davantage de processus et d’éléments), sont constamment améliorés et confrontés aux observations par la communauté des sciences du climat. Leur rôle central dans l’alerte sur le réchauffement global et l’anticipation des changements climatiques les a plongés au cœur de l’arène politique.
À l’origine des modèles de climat
La modélisation par ordinateur – ou modélisation numérique – du climat est née au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, presque en même temps que les premiers ordinateurs et que la prévision numérique du temps. Mais elle se fonde sur des connaissances scientifiques bien plus anciennes sur la circulation de l’atmosphère et les phénomènes météorologiques.
Les débuts de la météorologie et de la climatologie modernes
Une météorologie descriptive se développe dès le xviie siècle notamment grâce à l’invention de nombreux instruments (thermomètre, baromètre, anémomètre…). Ferdinand II de Médicis (1610-1670), grand-duc de Toscane, met en place le premier réseau d’observatoires, avec des stations instrumentées dans onze villes dont Pise, Florence, Paris et Varsovie. À bord des navires de commerce sillonnant les mers, on recense les vents et les courants marins, et l’astronome Edmond Halley (1656-1742) publie des cartes du monde où figurent les alizés de l’Atlantique comme les vents de mousson du Pacifique. Halley imagine l’organisation de la circulation atmosphérique en cellules intertropicales (l’air chaud monte près de l’équateur et redescend dans chaque hémisphère) et George Hadley (1685-1768) montre le rôle de la rotation de la Terre dans la déviation vers l’ouest des alizés – sans doute un des premiers « modèles » explicatifs de la circulation globale de l’atmosphère.
C’est au xixe siècle que progressent rapidement, quoique indépendamment, les trois « branches » de la météorologie : la branche empirique, qui est fondée sur le recueil et le traitement de données d’observation ; la branche théorique, qui cherche les explications des mouvements de l’atmosphère dans les lois de la physique ; la branche pratique, qui vise à prédire le temps. Sur le front des observations, l’invention, en 1817, des lignes isothermes par Alexander von Humboldt (1769-1859) a un impact majeur sur les représentations graphiques en météorologie. Mesures et représentations cartographiques sont[...]
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Écrit par
- Hélène GUILLEMOT : chercheuse CNRS, Centre Alexandre Koyré (EHESS, CNRS et MNHN), Aubervilliers
- Frédéric HOURDIN : directeur de recherche CNRS, Laboratoire de météorologie dynamique, Institut Pierre-Simon Laplace, Sorbonne université
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Médias