MODÉLISATION DU CLIMAT
Des modèles utilisés pour simuler le changement climatique
Le mécanisme de l’effet de serre a été étudié par des savants tels que Joseph Fourier (1768-1830), John Tyndall (1820-1893) et Svante Arrhenius (1859-1927). Lié à la capacité de certains constituants atmosphériques (principalement H2O et CO2) à limiter l’émission de rayonnement infrarouge vers l’espace, donc le refroidissement de la Terre et de son atmosphère, l’effet de serre se traduit par une élévation de la température à la surface de la Terre de plusieurs dizaines de degrés, contribuant à établir les conditions propices à la vie. À la fin des années 1950, des scientifiques ont montré que les émissions de CO2 liées aux activités humaines pouvaient provoquer un réchauffement de la planète en amplifiant l’effet de serre naturel. Les modèles de climat ont simulé ce changement climatique global dès les années 1970 (le rapport de Charney de 1979 marquant une étape importante dans cette alerte) avant que des observations des climats passés et présents en confirment la réalité. Depuis les années 1990, les rapports du GIEC sont alimentés par des projections de climats futurs orchestrées à l’échelle mondiale. Ces simulations confèrent aux modèles un rôle central dans le problème du changement climatique. Les débats autour de la confiance dans les modèles, de leur amélioration et de leurs forces et limites sont donc importants dans la perspective d’une réponse socialement partagée au défi climatique.
Les projections du changement climatique
Les modèles numériques couplant atmosphère, océan et surfaces continentales sont les seuls outils permettant d’anticiper les changements climatiques. Pour réaliser ces projections de climat futur, on fait démarrer les simulations avant l’ère industrielle (classiquement en 1850). Comme les observations de cette époque sont très insuffisantes pour définir l’état initial, on réalise des simulations sur plusieurs milliers d’années sans modifier la concentration de CO2 supposée rester à sa valeur préindustrielle, pour laisser le temps notamment à l’océan profond de s’équilibrer. Une fois que le modèle a atteint un « état de régime », on démarre des reconstructions historiques en modifiant la concentration du CO2 et des autres constituants ou en imposant les émissions et en simulant leur concentration. La capacité des modèles à reproduire l’évolution des températures du xxe siècle à partir de la seule spécification du changement de composition en CO2 et autres composants est un des éléments majeurs de confiance dans les projections.
Les projections de climat futur sont des prolongations de ces reconstructions historiques, dans lesquelles les évolutions possibles des émissions de gaz à effet de serre – appelées « scénarios » – sont issues de calculs réalisés par un autre type de modèles, dits socio-économiques ou intégrés. Pour produire des scénarios d’émission de gaz à effet de serre, ces modèles intègrent des représentations globales et simplifiées de l’évolution économique, sociale, démographique et technologique de la planète, et comportent une part de rétroaction avec le système climatique. Les projections de climat futur réalisées par tous les modèles de climat dans le monde en partant de ces scénarios sont au cœur des rapports du GIEC.
L’intercomparaison de modèles climatiques
La nature approchée des paramétrisations et la variété des choix physiques et numériques possibles (dont la taille de la maille) constituent des sources importantes d’incertitudes pour les simulations climatiques. Pour pouvoir documenter la part d’incertitude associée à ces choix, la communauté des sciences du climat a très tôt organisé des exercices de comparaisons de modèles visant à harmoniser le protocole des simulations : mêmes conditions aux limites, mêmes évolutions des gaz à effet de serre, même[...]
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Écrit par
- Hélène GUILLEMOT : chercheuse CNRS, Centre Alexandre Koyré (EHESS, CNRS et MNHN), Aubervilliers
- Frédéric HOURDIN : directeur de recherche CNRS, Laboratoire de météorologie dynamique, Institut Pierre-Simon Laplace, Sorbonne université
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Médias