GAMMOUDI MOHAMED (1938- )
Athlète spécialiste des courses de fond, Mohamed Gammoudi offrit, en 1968 à Mexico, la première médaille d'or olympique de son histoire à la Tunisie. Surnommé par la presse de son pays l'« Homme au semelles de vent », il demeure considéré comme le meilleur athlète tunisien. Compétiteur-né, stratège et fin tacticien, il construisait ses victoires grâce à un finish redoutable et fut le premier des grands coureurs de fond à se focaliser uniquement sur la victoire et à se désintéresser totalement des records.
Mohamed Gammoudi est né le 3 avril 1938 à Sidi Aïch (gouvernorat de Gafsa), dans le sud de la Tunisie. Initialement berger de profession, il choisit de faire carrière dans l'armée ; cette décision lui permet de se garantir des revenus un peu plus confortables et, surtout, de s'adonner à sa passion, la course à pied. En effet, il est nommé moniteur d'éducation physique dans l'infanterie et peut consacrer le reste de son temps à l'entraînement, dirigé par son commandant, qui a remarqué les qualités athlétiques du jeune homme. Cette formation fait de lui un excellent spécialiste des courses de cross-country ; le public européen le découvre ainsi en 1963 à l'occasion du Cross des nations de Saint-Sébastien (Espagne), dont il prend la septième place. La même année, il se distingue aux Jeux méditerranéens : il remporte le 5 000 mètres, devant le Français Jean Fayolle, et le 10 000 mètres. Néanmoins, pendant quelques mois, une tendinite contrarie sa progression. Il redouble donc d'efforts à l'entraînement, court quotidiennement une vingtaine de kilomètres, réalise quelques jolies performances dans les meetings athlétiques européens. Cependant, personne ne songe que ce petit Tunisien (1,71 m, 64 kg) puisse briguer une médaille aux jeux Olympiques de Tōkyō, en 1964, où il s'aligne dans le 10 000 mètres, une épreuve qui semble promise au recordman du monde australien Ron Clarke. Ce dernier, qui sait manquer de finish, imprime un train soutenu à la course, sans parvenir toutefois à décrocher tous ses rivaux. Dans l'ultime ligne droite, Gammoudi déborde l'Australien, mais, à quelques mètres de l'arrivée, le surprenant Américain Bill Mills vient le coiffer. Gammoudi, deuxième, apporte néanmoins à la Tunisie la première médaille de sa jeune histoire olympique.
Promu sergent, Mohamed Gammoudi continue d'enchaîner les bons résultats. En 1967, il remporte de nouveau le 5 000 et le 10 000 mètres aux Jeux méditerranéens, organisés à Tunis ; au début de 1968, il gagne le Cross des nations, qui se déroule aussi à Tunis. Gammoudi est désormais un champion reconnu ; il bénéficie des meilleures conditions d'entraînement possibles pour préparer les jeux Olympiques de Mexico, fait un long stage à Font-Romeu, dans les Pyrénées, afin de s'acclimater à l'altitude. En effet, l'une des particularités des jeux Olympiques d'été de 1968 est qu'ils se déroulent à 2 240 mètres d'altitude, ce qui a des conséquences sur les organismes en raison du déficit en oxygène. Le 13 octobre 1968, le 10 000 mètres se transforme en course par élimination, les athlètes connaissant les uns après les autres la défaillance – c'est le cas de Ron Clarke. Trois concurrents se trouvent finalement en tête : Gammoudi, ainsi que deux hommes des hauts plateaux, le Kenyan Naftali Temu et l'Éthiopien Mamo Wolde. Temu et Wolde, redoutant la pointe de vitesse du Tunisien, unissent leurs efforts, et Gammoudi finit par lâcher prise : il se classe troisième, derrière Temu (premier) et Wolde. Quatre jours plus tard, Gammoudi est au départ du 5 000 mètres. Ron Clarke tente d'imprimer un train assez soutenu, mais les coureurs des hauts plateaux le suivent assez facilement, alors que Gammoudi reste tapi dans le peloton ; à trois tours[...]
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Écrit par
- Pierre LAGRUE : historien du sport, membre de l'Association des écrivains sportifs
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