MOÏSE
Moïse doit sa célébrité aux textes de l'Ancien Testament. Il y est présenté comme le chef qui a conduit les Israélites hors d'Égypte et leur a donné leur loi, la Tōrah. Ce sont, en effet, les livres de la Tōrah (Pentateuque) qui, de l'Exode au Deutéronome, parlent le plus de Moïse. Le livre des Juges le mentionne rarement, mais il nous apprend que la famille de Moïse exerça le sacerdoce dans la tribu de Dan jusqu'au viiie siècle. Les rares mentions des livres prophétiques aident aussi à situer les traditions mosaïques. Pour Osée (milieu du viiie s. ; Nord), Moïse, sans être nommé, est le prophète qui a fait sortir Israël d'Égypte et l'a « gardé » (xii, 14). Pour Michée (fin du viie s. ; Juda), Moïse a été envoyé par Dieu au même titre que Myriam et Aaron pour sortir le peuple d'Égypte (vi, 4). Pour Jérémie (xv, 1 ; fin du viie s. ; Jérusalem), Moïse est, comme Samuel, un intercesseur pour le peuple devant le Dieu national. Ni le prophète Isaïe, ni le livre d'Ézéchiel, tous deux de Jérusalem, ne font référence à lui. C'est donc dans les tribus du Nord que la tradition mosaïque a été la plus vivace.
Moïse n'est connu ni des textes hiéroglyphiques, ni des textes cunéiformes, ni des inscriptions ouest-sémitiques actuellement découvertes. Hérodote, chez les Grecs (ve s. av. J.-C.), ne s'intéresse ni aux Juifs ni à Moïse. Diodore de Sicile (ier s. apr. J.-C.) reconnaît Moïse comme un grand législateur. L'historien égyptien Manéthon, qui, au iiie siècle avant J.-C., écrit pour les Grecs, paraît au contraire avoir une tradition indépendante défavorable aux Juifs expulsés d'Égypte comme impurs, tels les envahisseurs hyksos de la première moitié du IIe millénaire. Les maigres données d'Hécatée d'Abdère et de Chérémon seraient de la même veine.
Enquête historique
Les historiens se sont trouvés dans l'obligation d'analyser les textes du Pentateuque. Il fut établi au xixe siècle que, quoique ce livre pût contenir quelques textes de Moïse, celui-ci n'en était pas l'auteur. Le Deutéronome est, au plus tôt, de la fin du viiie siècle et la masse des textes législatifs dit « textes sacerdotaux » (P, Priesterkodex, tel le Lévitique) lui sont postérieurs. Restaient les textes prédeutéronomiques qui présentent deux séquences d'épisodes depuis les patriarches jusqu'à la conquête : la tradition jahwiste (J) d'allure plus familiale et dynastique, la tradition élohiste (E) plus prophétique, la première série ayant été rédigée dans le Sud et la seconde dans le Nord (Graf, Wellhausen).
Après cette analyse dite de « critique littéraire », la recherche s'est tournée vers les petites unités littéraires et leur préhistoire. Hugo Gressmann a considéré les traditions mosaïques comme des sagas dont le personnage central fut prêtre à Cadès, au sud du Néguev palestinien.
Parallèlement, les travaux de l'archéologie et de l'égyptologie permettaient de mieux situer les débuts d'Israël par rapport à l'histoire d'Égypte et aux mouvements des peuples voisins. Ainsi, sur la stèle de Merneptah (vers 1225 av. J.-C.), Israël est en Canaan. Les travaux d'E. Meyer, de Kittel, plus tard d'Albright et de S. Herrmann permettaient de préciser sinon la figure de Moïse, du moins son époque.
Il n'en restait pas moins de grosses divergences d'appréciation entre les spécialistes qui ont fréquemment éprouvé le besoin de faire le point : H. Cazelles, R. Smend, E. Osswald, H. Schmid, R. J. Thompson.
Après G. von Rad et M. Noth, une nouvelle école s'efforce de déterminer l'évolution non plus des unités littéraires, mais des traditions israélites. Pour Noth, les traditions du Pentateuque sont groupées en fonction de cinq thèmes indépendants : exode,[...]
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Écrit par
- Henri CAZELLES : ecclésiastique, ancien directeur à l'École pratique des hautes études
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