MOKUBEI AOKI (1767-1833)
Le peintre amateur
Il est probable que les premiers contacts de Mokubei avec la peinture furent, sinon antérieurs, du moins contemporains à sa formation d'expert en céramique et imputables à Kōfuyō, qui avait été un intime d'Ike no Taiga, à Kimura Kenkadō et ses amis peintres de l'école Nanga. Autodidacte en ce domaine, il n'y chercha qu'un délassement favori en marge de la poterie, mais en y montrant un talent égal (cf. japon - Les arts).
Peu d'œuvres subsistant, leur évolution est difficile à relever. La plus ancienne qui soit datée est de 1798 : Mokubei avait trente-deux ans. Il faut attendre treize ans pour découvrir la suivante. Puis une dizaine d'années encore avant d'arriver à la maturité, influencée par le paysagiste chinois Jiang Dalai, à qui il avait rendu visite à Nagasaki en 1822.
Après une certaine sécheresse au départ, le pinceau devient vite très libre. La technique se caractérise par la diversité et la redécouverte de l'esprit Nanga, avec pourtant certaines constantes dans le choix et le traitement des thèmes, ainsi que dans la composition. En effet, le paysage, dont la prédominance est absolue, est transfiguré par une inspiration plus chinoise que chez les autres tenants japonais du Nanga, ou, comme dans la série centrée sur la rivière Uji, corrigé à la manière impressionniste. D'autre part, la composition est empruntée souvent à la céramique, en ce sens que, comme dans le décor des bols, toute la profondeur est traitée avec la même densité, fouillée dans chaque plan, et que la progression classique fait place à une succession de temps forts tous également intenses. C'est là une composition parfaitement originale et d'une modernité certaine. Enfin, la sobriété de la palette ajoute encore au charme des peintures dont la monochromie est soit totale, soit rehaussée d'indigo et de brun, cette harmonie faisant songer, elle aussi, aux décors sur céramique.
Chez Mokubei, le potier et le peintre sont indissociables : on y retrouve la même qualité de talent. Pourtant, si la céramique a pu marquer sa peinture de manière originale, cette influence n'est pas réversible comme chez Kenzan. En fait, les deux facettes de son talent sont liées à sa culture chinoise, à son entourage intellectuel et artistique, à ses contacts avec les adeptes de la cérémonie du thé. C'est cette atmosphère qui le poussa, en tant que céramiste, à chercher dans la porcelaine chinoise une inspiration souvent heureuse et qui lui permit, comme peintre, d'assimiler parfaitement l'essence de la peinture des Lettrés.
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Écrit par
- Chantal KOZYREFF : conservatrice des collections Japon, Chine et Corée aux Musées royaux d'art et d'histoire, Bruxelles, gestionnaire des musées d'Extrême-Orient
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Autres références
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JAPON (Arts et culture) - Les arts
- Écrit par François BERTHIER , François CHASLIN , Encyclopædia Universalis , Nicolas FIÉVÉ , Anne GOSSOT , Chantal KOZYREFF , Hervé LE GOFF , Françoise LEVAILLANT , Daisy LION-GOLDSCHMIDT , Shiori NAKAMA et Madeleine PAUL-DAVID
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Adepte du Bunjinga (peinture des lettrés à la mode chinoise), Aoki Mokubei (1767833), s'adonna aussi à l'art céramique et fit preuve d'un grand éclectisme, s'inspirant souvent de modèles chinois, tout en les adaptant au goût de son époque. Cet éclectisme se retrouve dans les créations d'Okuda Eisen...