MOMIES, Égypte
Les techniques de la momification
Telle qu'elle est décrite dans ses Histoires par Hérodote, historien grec venu visiter l'Égypte vers 450 avant J.-C. (livre II, chap. LXXXV), la momification comporte une série d'opérations succédant à un premier lavage du corps, coutume commune pratiquement à toute l'humanité.
L'éviscération crânienne
Il s'agit de l'ablation du cerveau par la voie nasale au moyen d'une tige de métal (bronze) recourbée que l'opérateur enfonçait dans la narine gauche de façon à perforer le toit des fosses nasales (ethmoïde) et à accéder directement à la cavité crânienne. Le cerveau désagrégé à l'aide de la tige métallique était progressivement extirpé du crâne. L'opération terminée était en principe suivie du remplissage plus ou moins complet de la cavité crânienne par une « résine » d'aspect noirâtre, vitreux, rendue liquide par chauffage. On a retrouvé des entonnoirs à deux conduits ayant servi à introduire la résine par les narines. Parfois, on se contentait de remplir la cavité crânienne de linges mis en charpie. La destruction volontaire du cerveau montre que les Égyptiens n'avaient pas reconnu le rôle que joue cet organe dans la vie psychique.
L'éviscération abdominale
Elle était réalisée après ouverture du flanc gauche effectuée à l'aide d'un couteau d'obsidienne (la « pierre d'Éthiopie » d'Hérodote). Par l'ouverture, on extirpait les poumons, l'estomac et les intestins, le foie. Ces organes étaient lavés, déshydratés à l'aide de natron, bandelettés, puis, selon les époques, déposés dans des vases (les vases canopes) ou remis dans la cavité thoraco-abdominale, ou encore placés entre les membres inférieurs du défunt. Le cœur, considéré comme l'organe essentiel, siège des sentiments, des sensations et de l'élan vital, était laissé en place. Si on l'avait enlevé par mégarde, on le replaçait soigneusement dans le thorax.
Le bain de natron
Le natron, mélange naturel de carbonate et de bicarbonate de sodium, contenant également du chlorure et du sulfate de sodium, était utilisé sous forme de cristaux dont on recouvrait le corps préalablement éviscéré. Son action aboutissait à la déshydratation du corps ainsi qu'à la saponification des graisses. Au terme de cette opération, le poids du corps était ramené à 20 p. 100 environ du poids du sujet vivant. Pour certains auteurs le natron devait être utilisé en solution aqueuse. Cependant, les expériences effectuées au cours des années 1930 sur des pigeons (A. Lucas) et des rats (R. Garner) ont montré que seul l'emploi de cristaux de natron donnait des résultats satisfaisants.
Le second lavage du corps
Le second lavage du corps qui suivait, correspondant à une nécessité pratique, avait en même temps un sens symbolique. Il intervenait après la dessiccation du corps afin de le débarrasser des restes de natron et symbolisait sa régénération à l'image de celle du soleil Rê émergeant des eaux. Il était suivi d'une onction à l'aide de différents baumes et huiles, destinée à rendre au corps une certaine souplesse et à lui conférer une « bonne odeur ».
Le bandelettage
Venait ensuite le bandelettage, qui assurait au corps un isolement au moins relatif par rapport à l'environnement. Cette opération était extrêmement ritualisée et s'effectuait sous le contrôle direct d'un prêtre qui lisait ou récitait, à chacune des phases du bandelettage, les formules destinées à protéger les membres du mort et à lui en restituer l'usage. Au cours de cette opération, les amulettes protectrices étaient disposées entre les différentes couches de bandelettes. Une place à part devait être faite au « scarabée de cœur », censé remplacer le cœur en cas de perte de celui-ci. La valeur hiéroglyphique du scarabée, [...]
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Écrit par
- Françoise DUNAND : professeur d'histoire des religions à l'université Marc-Bloch, Strasbourg
- Roger LICHTENBERG : docteur en médecine, ancien chef du service de radiologie de l'Institut Arthur-Vernes, Paris
Classification
Médias
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