MOMIES, Égypte
Historique
Les différentes phases du « traitement » du corps du défunt n'ont été mises en œuvre que progressivement. Si les premières tentatives attestées de momification remontent à l'Ancien Empire, il faudra attendre le Nouvel Empire (environ 1530-1069) pour que la technique soit tout à fait au point.
À l'Ancien Empire, après une période où l'on se bornait à envelopper le corps de linges, éventuellement en peignant les traits du visage directement sur le tissu (parfois stuqué), apparaît la technique de l'éviscération abdominale. La reine Hétephérès Ire, mère de Chéops, avait été éviscérée : on a retrouvé ses paquets de viscères, placés dans un coffre en albâtre à quatre compartiments et baignant encore dans une solution de natron. Quelques rares momies de cette époque nous sont parvenues, en assez mauvais état. Il ne semble pas que le bain de natron était pratiqué pour l'ensemble du corps. En tout état de cause, la momification était manifestement réservée au roi et à une minorité de privilégiés.
Au Moyen Empire (env. 2200-1720), l'éviscération abdominale semble se développer, sans être systématique. L'éviscération crânienne est parfois observée. Les princesses royales (Achayt, Henhenet) dont les tombes ont été découvertes à Deir el-Bahari dans le complexe de Montouhotep II (XIe dynastie) n'avaient pas été éviscérées, mais étaient dans un état de conservation satisfaisant. Il est possible que leurs corps aient été préparés par injection anale. En revanche, les corps de soixante soldats, visiblement morts au combat et inhumés près de la tombe de Montouhotep, étaient dans un état de conservation assez médiocre. Sans doute ont-il été simplement desséchés à l'aide de sable, puis bandelettés.
Au Nouvel Empire (env. 1530-1069), le processus est à son apogée. Les progrès apportés à la technique sont essentiellement l'emploi presque généralisé de l'éviscération, qu'elle soit crânienne ou abdominale, et l'usage systématique du bain de natron. Les viscères, momifiés séparément, sont placés dans quatre vases, les vases canopes, que protègent les quatre génies, fils d'Horus : Imset, à tête humaine, protège le foie ; Hapy, à tête de babouin, les poumons ; Douamoutef, à tête de canidé, l'estomac et Qebehsenouf, à tête de faucon, les intestins.
Les momies royales découvertes en 1881 dans la cachette de Deir el-Bahari puis, en 1898, dans la tombe d'Amenhotep II sont les meilleurs exemples de la qualité atteinte par la momification à cette époque. Si on met à part l'état de conservation inégal, conséquence des pillages, on observe quand même des différences dans les résultats : à côté de la superbe momie de Séti Ier, certaines momies, telle celle de Toutankhamon, ont moins bien résisté au temps.
À partir du début du Ier millénaire, le nombre de momies va croissant, et surtout on utilise de nouveaux procédés visant à rendre au corps l'apparence de la vie. Ainsi on insère sous la peau de la sciure de bois, des linges, de façon à redonner du volume au visage, aux seins, aux membres... De même on inclut des « prothèses » oculaires pour augmenter l'expressivité. Les visages féminins sont peints en ocre jaune, ceux des hommes en ocre rouge selon la convention utilisée en peinture.
Aux époques ptolémaïque et romaine (330 av. J.-C. à 395 apr. J.-C.), la technique de momification n'évolue plus. Tout au plus peut-on noter le soin particulier donné au bandelettage qui forme des dessins géométriques très savants, en utilisant des tissus polychromes et des éléments décoratifs en stuc souvent doré. On utilise toujours les cartonnages et les sarcophages mais, à l'époque romaine, un usage nouveau fait son apparition, celui du portrait peint inséré dans les bandelettes : les « portraits[...]
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Écrit par
- Françoise DUNAND : professeur d'histoire des religions à l'université Marc-Bloch, Strasbourg
- Roger LICHTENBERG : docteur en médecine, ancien chef du service de radiologie de l'Institut Arthur-Vernes, Paris
Classification
Médias
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