MOMIES, Égypte
La découverte des momies
On ne peut pas vraiment parler de découverte... De tous temps l'Égypte a été connue des voyageurs pour être la terre des momies. Les Grecs Hérodote, Diodore, Strabon, sont nos premiers informateurs, témoins d'autant plus précieux qu'à leur époque le procédé était largement utilisé. Au Moyen Âge, les voyageurs arabes évoquent souvent l'existence des momies qui étaient mises continuellement au jour lors des pillages (ceux-ci ne faisant jamais que continuer les pillages antiques). Si on met de côté les brèves incursions des croisés au xiiie siècle, c'est surtout à partir du xve siècle que les Européens viennent en Égypte et dans le même temps découvrent cette pratique étrange. Ces nouveaux voyageurs s'étonnent de la manière dont les anciens Égyptiens « confisaient si bien [les corps] à l'éternité qu'ils durent encore et dureront sans fin » (Pierre Belon du Mans, Observation de plusieurs singularitez... 1555). C'est à cette époque que se développe une véritable industrie celle de la « mumia » : les momies sont réduites en une poudre qui est mélangée à d'autres ingrédients pour constituer un remède très utilisé dans la pharmacopée. Comme le rapporte le voyageur Christophe Harant en 1598, « le roi François, premier de ce nom, ne voyageait pas sans un morceau de momie ». Ce produit va être en usage jusqu'au début du xixe siècle.
Par ailleurs, les momies sont l'objet d'un intérêt qui leur vaut d'être ramenées en Europe pour orner les cabinets de curiosités. C'est ainsi que le peintre Rubens, le surintendant Fouquet, le magistrat aixois Peiresc en possèdent dans leurs collections. En fait, c'est l'expédition d'Égypte (1798) qui initie l'intérêt scientifique pour les momies. L'égyptologie était née. Mais ce sont essentiellement les monuments qui sont étudiés et, bien souvent, les momies ne sont prises en compte que d'une manière secondaire. Pendant une bonne partie du xixe siècle, les expéditions envoyées en Égypte pour enrichir les collections publiques et privées ramènent un matériel archéologique abondant mais, dans le même temps, conduisent à la détérioration, voire à la destruction de nombreuses momies. La découverte des momies royales va faire prendre conscience de l'intérêt des restes humains. C'est d'abord, en 1881, la découverte de la cachette de Deir el-Bahari, près de Thèbes, où étaient conservées les dépouilles de quarante pharaons et personnages des familles royales du Nouvel Empire. En 1898, une nouvelle trouvaille enrichit la collection de quinze pharaons ou personnes royales, qui avaient été cachés dans la tombe d'Amenhotep II. Enfin, en 1922, la découverte de la tombe de Toutankhamo vient encore ajouter à l'intérêt porté à ces dépouilles prestigieuses. Progressivement, des momies moins fameuses vont bénéficier de l'attention des savants. L'archéologue britannique William Flinders Petrie est sans doute le premier qui ait pris en compte les momies pour elles-mêmes, fussent-elles anonymes. Ses fouilles, en particulier au Fayoum, ont enrichi les collections publiques, égyptiennes et britanniques. Pourtant, les grandes nécropoles fouillées depuis la fin du xixe siècle (Thèbes, Memphis) n'ont pas fourni, semble-t-il, un matériel humain très important, sans doute en raison des pillages constants depuis l'Antiquité. En revanche, des fouilles de nécropoles tardives comme celle d'Antinoë ont livré de nombreuses momies aujourd'hui dispersées dans divers musées.
Depuis le début des années 1980, les fouilles de nécropoles se poursuivent. Dans la région thébaine, une mission japonaise et une mission française explorent des tombes du Nouvel Empire réutilisées à l'époque tardive. À Antinoë, une mission italienne a repris[...]
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Écrit par
- Françoise DUNAND : professeur d'histoire des religions à l'université Marc-Bloch, Strasbourg
- Roger LICHTENBERG : docteur en médecine, ancien chef du service de radiologie de l'Institut Arthur-Vernes, Paris
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Médias
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