MÔN
Œuvres plastiques et littéraires
À plusieurs reprises, les Môn ont transformé les apports de l'Inde pour créer des styles propres, dont s'inspireront à leur tour les cultures voisines. Le « Bouddha asexué môn » sera reproduit et conservé dans toute l'Asie du Sud-Est, de même le Bouddha assis « prenant la terre à témoin ». Mais il y a eu aussi des formes qui n'ont pas duré, malgré leur originalité : ainsi des énormes « roues de la Loi », en pierre, qui devaient être dressées sur un piédestal élevé, à l'entrée de l'enceinte des temples.
L'art môn se caractérise par la symétrie et la frontalité. En évoluant à partir d'un modèle indien (pallava, post-gupta, puis pāla), il simplifie de plus en plus le même ensemble de motifs. Parfois, au contraire, il évolue vers des outrances, comme à Haripuñjaya, dans le traitement des visages en terre cuite.
À Pagán, l'influence pāla prédomine au début, notamment pour les peintures murales de l'intérieur des temples. Quant au décor, souvent en stuc ou en terre cuite, quand il n'est pas d'inspiration bouddhique, il représente, par des symboles, des mythes solaires complexes.
L'architecture a considérablement évolué. Les temples sur terrasse à niches décorées du début voisinent avec des stūpa (reliquaires géants en forme de cloche ou de bulbe). Puis il y aura – à Haripuñjaya – des monuments à étages décroissants et, à Pagán, des temples cruciformes à corridors et noyau central plein, selon un modèle indien, qui reproduit l'ensemble, miniaturisé, sur les toits. De l'architecture civile, et singulièrement des palais royaux, il ne reste que ce qu'en décrivent les inscriptions, particulièrement à Pagán et à Pégou. Hormis cela, tout l'art est religieux et se veut édifiant.
La littérature, en dehors de celle des inscriptions – souvent fort belle –, est mal connue. Elle va des textes historiques à des mythes, des commentaires religieux à des traités (de magie, de médecine, d'astrologie, de grammaire). Mais elle comprend aussi des recueils de poèmes narratifs, soit ironiques soit graves. Les recueils juridiques sont importants car ce sont les Môn qui, avant le xie siècle, ont adapté les lois de Manu indiennes à une société bouddhisée. Toutes les autres cultures de la région s'en sont, par la suite, inspirées. Mais le genre préféré des Môn d'hier et d'aujourd'hui reste l'épopée, pour sa théâtralité, et parce qu'elle exalte un sentiment de l'honneur qui leur est cher.
Le style oscille entre le lyrisme et la concision assez sèche. Les métaphores y sont parfois très subtiles, jouant du double sens, abstrait et concret, de certains termes.
Dans la littérature orale, plus populaire, et plus leste, il subsiste des traces du passé prestigieux de ce peuple, en même temps que de la métrique complexe de la poésie de cour. Mais l'écrit reste l'objet du plus grand des respects et les livres le plus souvent réimprimés, encore de nos jours, sont les syllabaires et les manuels pour apprendre à lire le môn.
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Écrit par
- Emmanuel GUILLON : docteur d'État, enseignant de môn à l'Institut national des langues et civilisations orientales
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Média
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