ÉGÉEN MONDE
La civilisation égéenne du bronze ancien
Il est probable que Troie et l'Anatolie occidentale ont été les centres de diffusion dans l'Égée de la culture du bronze ancien. D'après Thucydide en effet, les Cyclades étaient peuplées de Cariens, originaires d'Asie Mineure, avant la période de l'hégémonie minoenne. Quelle que soit l'origine des arrivants, les habitats se multiplient au bord de la mer ou à l'intérieur des terres. L'intensification des relations commerciales n'empêche pas l'insécurité. À Syros, l'acropole de Khalandriani est défendue à cette époque par un double mur du côté où elle est le plus facilement accessible. Le mur intérieur est renforcé de tours semi-circulaires qu'on ne retrouve qu'une seule fois dans le monde égéen, à Lerne sur la côte orientale du Péloponnèse, et, bien plus à l'ouest, à Los Millares sur la côte espagnole, preuve des relations étroites qui unissent dès lors différents points du Bassin méditerranéen.
Aucun habitat cycladique de cette époque n'a été fouillé complètement et, à Phylakopi, dans l'île de Mélos, les vestiges datant du bronze ancien sont rares sous les constructions plus récentes. Les villages ne comportaient que d'humbles maisons, aux murs de brique crue ou de pisé sur un soubassement de pierres. L'originalité de l'architecture cycladique se manifeste mieux dans la construction des tombes. À côté du type le plus répandu, la tombe à ciste, simple boîte rectangulaire ou trapézoïdale faite de dalles dressées de chant et fermée par quelques plaques, se développe à Syros un type de tombe à couloir, porte et chambre voûtée. La chambre peut avoir des formes variées et plus ou moins régulières ; les murs, construits en pierres sèches, s'incurvent doucement en encorbellement, de sorte qu'ils ne laissent plus entre eux au sommet qu'un faible intervalle qu'il est facile de fermer avec une rangée de dalles. Les dimensions sont encore faibles, supérieures toutefois à celles d'une tombe à ciste, et le mort que l'on y a déposé – il n'y a généralement qu'un seul corps dans la chambre – ne semble pas y avoir été introduit par le couloir.
Le marbre que l'on trouve en abondance à Paros et à Naxos ne suffit sans doute pas à expliquer la floraison dans les îles d'œuvres sculptées dans la pierre, vases, figurines ou statues. Toutes attestent la même recherche : chaque objet, du moins parmi les plus beaux, est construit géométriquement, tout de pureté dans la ligne et d'équilibre dans les volumes. Certains vases reproduisent curieusement les formes d'un visage humain stylisé. À côté de petites figures schématiques en forme de violon, des statuettes de quelques dizaines de centimètres ou des statues de taille humaine continuent la tradition de la grande déesse néolithique. Le modèle n'a pas changé : elles sont debout, nues, les bras repliés sur le ventre ou sur la poitrine. Mais le type est entièrement nouveau. Au lieu de l'exagération des formes qui caractérise la plupart des créations néolithiques, les statues cycladiques ont de longs membres grêles, les seins à peine marqués, et toute stéatopygie en est absente. C'est pourtant la même idée de fécondité qui se trouve ici matérialisée, comme le prouve l'indication à peu près constante du triangle sexuel, incisé. Mais tout s'est en quelque sorte géométrisé, le corps entier s'inscrit dans un réseau de lignes pures. L'œuvre apparaît comme désincarnée et quelques rehauts de couleur ne devaient pas modifier l'impression qu'elle donne maintenant. Si les « idoles » féminines et les rares effigies d'un personnage masculin s'insèrent sans effort dans un panthéon dualiste, il est plus difficile de découvrir la place qui revient à des figures de musiciens, joueurs de harpe ou de flûte. Hommes ou dieux, ils semblent participer à de mystérieuses[...]
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Écrit par
- Olivier PELON : maître de conférences d'archéologie du Proche-Orient à l'université de Lyon-II
Classification
Médias
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