ÉGÉEN MONDE
La civilisation mycénienne
Le palais
Quelle qu'en soit la cause, la ruine de Knossos marque la fin de la civilisation des palais en Crète. Le continent va maintenant affirmer son originalité.
Rien n'est plus différent du palais crétois que le palais mycénien. Sans doute ont-ils des similitudes, dans l'appareil des murs, l'emploi de briques crues ou d'un mélange de pierraille et d'argile renforcé par un bâti de poutres, l'utilisation de blocs bien équarris sur les façades, la forme de la colonne ou le revêtement des sols, plus encore le souci de rendre le cadre attrayant en couvrant les murs de fresques aux couleurs vives. Les différences de structure n'en sont pas moins essentielles.
Le palais mycénien est construit sur une acropole, à l'intérieur d'une forteresse. À vrai dire, les énormes murs de fortification qui l'entourent à Mycènes, à Tirynthe ou en Béotie dans l'île de Gla sont pour la plupart de construction récente (xiiie s. av. J.-C.). En Crète, par contre, mis à part celui de Phaistos, aucun palais ne s'élève sur une hauteur nettement marquée ; nul, pas même Phaistos, n'a été conçu pour une éventuelle défense. Du palais minoen on passe presque insensiblement dans la ville ; le palais mycénien s'est de tout temps placé en dehors de l'agglomération. C'est le signe d'une conception de la royauté qui n'est pas d'origine crétoise. L'enceinte fortifiée ne fait que matérialiser sur le terrain une séparation de fait existant depuis longtemps.
Les murailles mycéniennes sont construites en blocs énormes, non travaillés ou sommairement équarris et pesant souvent plusieurs tonnes, dont la pose était dans l'Antiquité attribuée aux Cyclopes ; elles atteignent jusqu'à 17 mètres de large à Tirynthe et dépassent, aujourd'hui encore, la hauteur de 8 mètres à Mycènes. Elles étaient couronnées par une superstructure en briques crues. Dans l'épaisseur du mur était aménagé à Tirynthe un système de galeries et de chambres-magasins dont la magnifique voûte en encorbellement prouve la puissance de la construction.
L'entrée était celle d'un château fort ; une porte à deux battants encadrée par des jambages monolithes s'ouvrait dans un rentrant de la muraille facile à défendre. À Mycènes, au-dessus de l'énorme linteau, deux lions-gardiens sculptés dans la pierre conféraient au portail une majesté royale. Seul le palais de Pylos est resté sans défenses au moment où toute la Grèce mycénienne se fortifiait.
C'est lui qui offre l'image la plus complète d'un palais. À la place des nombreuses salles qui, dans le palais crétois, se disposent sans rigueur autour d'une cour centrale, on remarque la simplicité et la netteté du plan de Pylos. L'ensemble est organisé autour d'une salle principale et de ses annexes, le mégaron, dont le plan a déjà été étudié et qui apparaît ici sous son aspect le plus élaboré. Au-delà d'un porche à deux colonnes qui donne sur une courette, puis d'un vestibule étroit et long, on trouve la salle du trône, de dimensions très supérieures à la moyenne et à peu près semblables dans tous les palais ; le trône, probablement de bois à incrustations d'ivoire, était placé contre le mur de droite ; au centre de la salle, un grand foyer circulaire, enduit de stuc peint, était encadré par quatre colonnes qui soutenaient un lanterneau ouvert dans le toit, par où s'échappait la fumée.
Autour du mégaron s'organisent les longs couloirs de service et la série des magasins où étaient entreposées les grandes jarres de vin et d'huile, enchâssées dans des banquettes le long des murs, ainsi que les offices où l'on rangeait l'abondante vaisselle des banquets royaux. Un peu à l'écart, on a identifié la salle de la reine et une salle de[...]
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Écrit par
- Olivier PELON : maître de conférences d'archéologie du Proche-Orient à l'université de Lyon-II
Classification
Médias
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